Ouh, la daube! D'autant plus insupportable que le précédent film de Benoit Jacquot, Les adieux à la Reine, était une merveille d'élégance et de subtilité.
Elégance et subtilité, voilà qui semble bien caractériser ce réalisateur. Il a beaucoup travaillé pour l'opéra, ces derniers temps, et à Paris on l'adore. [Faut dire qu'à Paris, quand un metteur en scène ose sortir du Regietheater et ne pas situer l'action dans une pissotière, ça fait du bien]. Son Werther, classique et classieux, était une réussite. Même que je l'ai vu deux fois! Une fois en version ténor, pour Jonas Kaufmann, une fois en version baryton, pour Ludovic Tézier.....
Refermons la parenthèse opératique. Entendu un critique dire avec des trémolos dans la voix, que Jacquot renouait avec la veine du cinéma de Douglas Sirk....Ouh, le compliment qui tue!! Car Douglas Sirk, de son temps, était déjà totalement imbuvable....
Bon, vous avez lu le pitch partout. Une petite ville de province. Marc, contrôleur des impôts sentimental, rate le dernier train. Il demande l'adresse d'un hôtel à Sylvie (Charlotte Gainsbourg), qui passe par là. Dzzzinining! Coup de foudre? -non, à ce niveau là, c'est chaise électrique direct. Au lieu d'aller à l'hôtel, Marc passe sa nuit à marcher avec Sylvie, à parler, au petit matin ils se donnent rendez vous à Paris, mais surtout pas leurs numéros de portable, comme le font toutes les personnes sensées (si un mec ne me demande pas mon numéro de portable, j'en conclus qu'il n'a pas vraiment envie de me revoir). Ben oui, s'ils avaient échangé leurs numéros, y aurait pas eu de film! (on y aurait échappé). Sylvie est au rendez vous, mais pas Marc. Il vient d'avoir un infarctus, ce qui est une raison tout à fait valable pour rater un rendez vous. Du coup, Sylvie part avec son fiancé à Minneapolis, bien que ce soit avec déchirement qu'elle quitte pour la première fois sa sœur chérie, Sophie. Minneapolis, tout de suite, le nom n'est pas gratuit! Parce qu'on part à Fort-Lauderdale ou à Grand Junction, à Idaho Falls ou à Sonora, à Albuquerque..... mais pas à Minneapolis!
Plus tard Marc retourne dans la petite ville. Il n'y retrouve pas Sylvie, évidemment, puisqu'elle est à Minneapolis, mais une certaine Sophie (Chiara Mastrioanni). Qui est, mais oui mais c'est bien sûr! la fameuse sœur chérie de Sylvie! Dzing.... Coup de foudre? -non, c'est plutôt comme quand on met malencontreusement la main sur une clôture à vaches, voyez. Enfin bref, ils se marient, sous l'œil bienveillant de la reine-mère, notre magnifique Catherine Deneuve qui semble avoir abandonné le combat contre l'embonpoint. Peu importe, madame, vous êtes toujours la plus belle. Et kiki va se passer le jour où Sylvie rentrera de Minneapolis, hein?
Alors, cette histoire, vous l'avez lue partout -tous les journaux se sont fait un plaisir de vous la raconter. Mais, peut être pas tout à fait avec le même éclairage. Car vous vous écriez: comme tu le racontes, c'est grotesque! Mais C'EST grotesque. C'est bien le problème. On n'y croit pas une seconde. Jamais on ne rentre dans le film. Elles ont beau verser beaucoup de larmes -on s'en tape. Bon, les deux filles sont parfaites. Et elles sont très joliment filmées, ça on ne peut pas le retirer à Jacquot.
Ajoutons que, pour couronner le tout, apparait de temps en temps une lugubre voix off qui commente l'action!
L'ultime problème, c'est Benoit Poelwoorde. Parfait, lui aussi. Excellent. M'enfin..... ce type là peut tout jouer, du contrôleur de wagon lit claustrophobe au sérial killer dépressif, mais en bourreau des cœurs capables de réduire au désespoir de si jolies femmes, NON! Quand il embrasse Sophie, il ne sait pas quoi faire de son grand pif....
Le verdict? A fuir. Monsieur Jacquot, je vous en prie, la prochaine fois, laissez à quelqu'un d'autre le soin d'écrire le scénario!