Le polar burné avec mâchoires serrées mal rasées, c'est pas trop mon truc. Mais bon… J'ai pas eu le choix. Pourquoi, Léo? Par obligations contractuelles, je devais assister au duel des deux acteurs les plus antipathiques de notre pays, voilà pourquoi! La cinéphilie, c'est pas tous les jours la samba à Rio. Mon pire cauchemar? Me retrouver coincé entre Niels Arestrup et Gérard Lanvin dans un ascenseur exigu à 3 heures du mat'. Gros malaise en perspective. La scène d'ascenseur dans Drive: un léger accrochage à côté. Ces mecs, tu vois tout de suite que ce sont eux. -Eux? -Oui eux… -Eux, Les Autres? -Mais non pas Les Autres enfin. -Alors qui? -Ceux dont on parle tout bas, ceux qu'on ne voit jamais, ceux qu'il ne faut surtout pas emmerder, sinon… Je vous fais pas un dessin. Si par malheur, je les croise un soir sur les Champs, je baisserais tellement les yeux que j'arriverais presque à voir mon cou. Scorsese les aurait refoulé pour Les Affranchis, il paraît… Motif invoqué? Trop nerveux. Il a préféré caster deux lascars plus cool: Joe Pesci et Tony Sirico. 96 heures est une croûte immonde fière d'elle. Déjà qu'après Les Lyonnais, L'Immortel, RIF, Le Guetteur, L'Avocat, La Proie et Mea Culpa, les amoureux de polar sont obligés de prendre des trucs pour ne pas tomber en dépression nerveuse. Soyons positif, j'ai aimé deux choses 1) Des comiques du Palmashow ont piégé la production en se faisant passer pour des méchants gangsters russes 2) Un figurant de Plus belle la vie a réussi l'exploit d'obtenir, grâce à Dieu (explication peu plausible) ou grâce à Don Corleone (explication encore moins plausible) ou grâce à l'incompétence des producteurs et du réalisateur (bingo!), le rôle de l'avocat. Un avocat corrompu, bien sûr. Mais bon ça, on s'en serait pas un peu douté?! Un cliché de plus? Un cliché de moins? On va pas chipoter, ça serait mesquin… Les deux stars s'emmerdent vite dans cette histoire bidon. Un profil bas poli, du style oui-c'est-bien-moi-mais-c'est-pas-ma-faute-hein-j'ai-eu-la-flemme-de-lire-le-scénario-et-personne-ne-peut-refuser-un-cachet-comme-ça-vous-comprenez, c'était l'évidence même (Édouard Baer est très bon à ce jeu-là). Tssss… Trop facile pour Niels et Gérard. Eux, ils préfèrent se lancer sans parachute avec une foi surnaturelle dans un grand concours de virilité exacerbée. Une sorte de festival effrayant de kamikazes de la couille. Histoire d'alourdir un film déjà bien trop lourdingue. Nan, vraiment, bien joués les gars. Arestrup et son allumette atteignent des points de non-retour dans le grotesque en grand méchant loup te-rri-fiant. Il mérite haut la main le César de l'acteur le plus excessif de la décennie. Au bout d'un moment, j'espérais une fin rigolote avec un combat de catch à la Borat. Un contre-pied burlesque aurait été la seule solution viable artistiquement pour tenter de sauver les meubles d'une manière digne. Tu penses! Même pas cap, les durs. Au lieu de ça, un rebondissement vaudevillesque ridicule s'occupe tout seul comme un grand d'emmener le film dans des sphères inexplorées du n'importe nawak. Parfois, seul dans ma chambre, je mets à chialer lorsque je vois qu'un film aimé n'a pas dépassé 200 000 entrées. Le public est cruel et je reste un garçon émotif. On m'apprend à l'instant que 96 heures n'a pas dépassé 200 000 entrées... Champagne!