Il est difficile pour un amateur de comics et de cinéma de voir à quel point les producteurs et un réalisateur en manque d’inspiration peuvent détruire un mythe, une œuvre riche et sacrifier des héros sur l’autel de la bêtise.
A l’image de Double-Face, Zack Snyder est capable du meilleur (« Watchmen », « 300 ») comme du pire (entendez le film qui nous préoccupe ici). Cette vaste blague cinématographique qu’est « Batman V Superman », proche de la caricature, se veut la porte d’entrée vers une série de films qui laisse présager le pire. En effet, le réalisateur a déjà dans ses cartons « Justice League, partie 1».
Là, on retrouvera un Batman fédérateur qui réunira tous les super héros, (Aquaman, Wonder Woman et tous les autres méta humains du bestiaire de DC Comics)afin de défendre la planète d'une nouvelle grande menace…
« Batman V Superman » n’est finalement qu’un préquel écoeurant qui n’a pour seul but que de préparer une suite voulant concurrencer Marvel et ses « Avengers ». Avec son dernier film, Snyder provoque chez nous, de lourdes remontées acides. Explications :
Dans le procès que nous intentons à ce blockbuster too much, reconnaissons-lui sa seule qualité : son méchant. Après tout, ce n’est déjà pas si mal. Dans le rôle de Lex Luthor, nous retrouvons un acteur qui compte et qui a su gravir marche après marche l’ascension vers une certaine renommée. En effet, Jesse Eisenberg (« Le village », « The social Network », « Bienvenue à Zombieland », « Insaisissables », «To Rome with Love ») nous surprend totalement. Jusqu’ici, il incarnait des personnages tantôt maladroit, en retenue, mal dans leur peau, timide, organisé ou visionnaire. Dans « Batman V Superman », il incarne la folie de façon magistrale en cabotinant à la manière de Jack Nicholson dans son rôle de Joker (chez Tim Burton). S’il y a un personnage qu’on attend de voir à l’écran, c’est lui. Il efface la prestation des autres comédiens qui ne font que remplir leur contrat.
Commençons par les deux têtes d’affiche : Ben Affleck, dans le rôle du chevalier noir et Henry Cavill dans celui de Superman, véritable chevalier blanc. Tous deux rempilent de façon convenue dans des rôles déjà vus bon nombre de fois à l’écran. Ni mauvais, ni bons, ils font le job sans marquer les esprits. Dans les seconds rôles, un Jeremy Irons en Alfred, le majordome (Comme Michael Caine nous manque…).
Dans celui de la mère du fils de Krypton, une Diane Lane vieillissante mais pourtant talentueuse, à qui on ne laisse pas le soin d’exister
. Dans le même registre, Laurence Fishburne (Monsieur Morpheus) qui essaie d’insuffler un peu de crédibilité et un peu d’épaisseur dans la pratique journalistique du Daily Planet… en vain.
Et dans le rôle de celui qui vient encaisser son chèque, Monsieur Kevin Costner, bon acteur qui, à l’image de Diane Lane, est relégué au second plan et n’a pas l’opportunité de remontrer l’étendue de son talent
. La faute à un studio misant tout sur la jeunesse ? Même Alfred a rajeuni dans ce nouvel opus pour pré-pubères…
Dans le registre des incompréhensions, continuons. Comment un compositeur aussi talentueux qu’Hans Zimmer a-t-il pu orchestrer des compositions aussi grandiloquentes et ô combien pompeuses, déjà entendues maintes fois et à la limite du kitsch ? Oh, la réponse se trouve sans doute dans la collaboration qu’il a eue avec Junkie XL (…tout est dans son nom).
Le plus douloureux, pour l’amateur de cinéma que nous sommes, est de ne voir aucune intelligence, aucune psychologie de personnages, aucun motif de représailles… Le scénario est à l’image d’une ligne d’encéphalogramme : plat. Véritable peau de chagrin, ce projet aurait bien eu besoin d’ambition et de talent pour tenir le spectateur éveillé durant 2h30 (et Dieu sait que c’est long quand le film est mauvais !
Le plus énervant à présent : la réalisation ! Afin de s’économiser sur la conception des décors de Métropolis, de Gotham et de la jonction entre ces deux univers graphiques, l’équipe du film a trouvé une astuce : on abuse et réabuse des gros plans sur chaque séquence. Chaque coup de poing porte sur le gant. Le plan le plus audacieux est sans doute de filmer notre héros en entier sans jamais l’intégrer dans un plan large… sauf quand il s’agit de le faire tournoyer dans les airs à travers un nuage de feu et de cendre. Autant la première partie du film manque d’intention et fait passer Batman pour un amateur, autant la deuxième semble appartenir à une autre saga : celle des Power Rangers.
Affublé d’une armure style mécha, Batman s’associera à son nouveau rival, Superman, pour contrer la création de Lex Luthor, un « troll » improbable (à la seigneur des Anneaux) sur fond d’éclairs multicolores et omniprésents. Epileptiques s’abstenir sous peine de crise aiguë.
A cet agacement s’ajoute un étonnement.
Pourquoi faire intervenir des super héros dépassés. Wonder Woman, Aquaman, Flash avaient toute leur raison d’être dans les années 1940 mais à l’Aube d’une nouvelle ère, ressortir des personnages sentant la naphtaline, c’est un peu risqué… On reste dubitatifs par ce choix et on se demande à qui s’adresse ce long métrage et qui remplira les salles ces prochaines années ?
A la limite de la série Z, ce film n'a pas de réel intérêt. De mémoire, nous n’avions quasiment jamais vu ça… nous aurions dû nous en tenir à la bande annonce, qui en dit long ! A la sortie de ce film, nous n’avons qu’une seule certitude. Nous ne dépenserons plus jamais un seul denier dans la suite cinématographique des aventures DC Comics de cet acabit, mal nous en a pris !