Bon… Autant être honnête dès le départ : rien que sur le papier, ce projet, je trouvais qu’il puait. Vouloir associer les figures de Batman et Superman dans le même film, déjà, pour moi, c’est comme vouloir mélanger le plus racé des vins avec un Coca bien dégueulasse. Bah oui, désolé, mais moi je ne vois vraiment pas l’intérêt d’un super-héros qui, comme Superman, a TOUS les super-pouvoirs. Il sait tout, il voit tout, il peut empêcher tout : mais où peut donc se trouver l’enjeu franchement ?! Ce truc est un dieu omniscient et omnipotent. Or, à part si le film entend éventuellement s’intéresser à ce qui pourrait se passer par la tête de ce dieu, et sur ce qui pourrait motiver ses actions dans ce monde rempli d’humains bien frêles, personnellement, je ne vois vraiment pas ce qui pourrait m’attirer là-dedans… Mais les plus malins auront déjà peut-être compris ce qui, malgré tout, m’a conduit à voir ce « Batman v. Superman. » Pour ma part ce fut clairement le trailer. Quand j’y ai vu ces prosternations divines face à Superman ; quand j’y ai vu cette statue de Superman avec les mots « Fake God » inscrits dessus, et surtout quand j’ai vu le costume trop « bad ass » de Batman, je me suis dit que, peut-être, le Zack Snyder de « Watchmen » était de retour… Oui, je me suis pris à espérer que ce « Batman v. Superman » allait peut-être se risquer à se faire film d’atmosphère ; et oui aussi, je me prenais à espérer qu’il allait se risquer également à se faire film dérangeant… Seulement voilà, au final, que dalle… Alors oui, il y a bien deux ou trois plans jolis (ceux qui se veulent justement iconiques, la moitié étant déjà dans la bande-annonce, mais bon…) par contre, pour le reste, il faudra repasser. En gros, jamais la question du rapport des humains à ce dieu qu’est Superman n’est véritablement traitée autrement que de la manière la plus superficielle qui soit. D’ailleurs, pour ceux qui jugeraient ma remarque de mauvaise foi, je me permets juste un petit test. Imaginez dans votre tête comment on pourrait traiter la question d’humains vulnérables face à un héros invulnérable. Je ne sais pas vous, mais moi ça se limiterait à : « est-ce qu’on doit se soumettre à lui parce qu’on n’a pas de choix ou bien est-ce qu’on cherche un moyen de le forcer à se plier à nos règles ? » Oui, j’avoue, je ne suis pas allé chercher bien loin. En même temps j’ai déjà vu « Dark Knight » comme la moitié de la planète, donc ce n’était pas trop dur non plus d'en reprendre l'enjeu principal pour le transposer à Superman. Maintenant prenez mon idée, voyez le film, et dites-moi franchement ce qu’il y a de plus que ce que je viens de vous dire. Moi, perso, en 2h30, je n’ai rien vu de plus que ça… Parce que oui, au fond, j’ai vraiment le sentiment que cet aspect, qu’on met pourtant en avant et qui sert de justificatif à l’intrigue, relève plus du détail qu’autre chose. D’ailleurs, au cours du film, quand j’ai vu comment ce « Batman v. Superman » commençait à nous introduire plein d’autres super-héros DC à la manière d’un « Avengers » de chez Marvel ; quand j’ai vu aussi de quelle manière les scènes d’action arrivaient de façon régulière, à la seconde près, et surtout quand j’ai constaté à quel point le scénario était rempli de trous d’air pour justifier le fait que Batman et Superman devaient se mettre sur la tronche, je me suis dit qu’au fond, Zack Snyder ne devait pas tant avoir la main que ça sur son film. Comme tous les réalisateurs de blockbusters aujourd’hui (Warner excepté peut-être), le pauvre Zack a certainement dû se contenter que des quelques espaces laissés par le cahier des charges de la prod pour essayer de raconter quelque-chose, d’où le vide abyssal de fond dans ce film. J'avoue ne pas comprendre ces films qui tripatouillent plein d'intrigues en même temps, toutes composées de petits mystères facilement résolus, sans que pour autant ceux-ci n'aient de véritables enjeux particuliers par rapport au propos principal. Pour moi, c'est chercher à occuper l'esprit des gens avec des outils de distractions qui n'apportent rien au final à notre perception du film. C'est vraiment une surcharge inutile que je trouve pénible. (
Pour le coup, toutes les combines et les mystères qui tournent autour de Lex Luthor se révèlent bien vides tant les motivations de ce personnage horripilant semblent puériles et ses actions totalement incohérentes par rapport à ses objectifs. Je pense notamment à ce choix incroyable de ressusciter Zod. Quel intérêt à part celui de perdre tout contrôle de la situation ?
) En même temps voilà, comme je le disais plus haut, quand tu te décides à faire un film d’action avec Superman en guise de héros, il faut s’attendre à ce qu’il ne se passe rien d’intéressant… où alors il faut y mettre une belle dose d’absurdité et d’incohérences pour faire en sorte qu’il y ait un film. Moi, personnellement, j’ai été subjugué de constater à quel point Superman faisait des efforts démentiels de stupidité afin de permettre au film d’exister. Trois quarts des péripéties qu’on voit à l’écran ne devraient pas avoir lieu si l’ami à la cape rouge n’avait pas des pouvoirs sélectifs et un bout de kryptonite carré dans le cerveau.
Superman sauve Loïs au milieu du désert après une étrange mise en scène pour l’accuser. Va-t-il demander à Loïs d’attendre huit secondes le temps d’aller rattraper et neutraliser les fuyards ? Non. Il préfère qu’on lui mette ça sur le dos, il ne voit pas le problème. Pourtant les médias dans la foulée lui cassent du sucre à longueur de journée. Les gens ont peur. Est-ce que du coup Superman décide de dissiper le malentendu en se contentant simplement de dire « Ce n’est pas moi ! Franchement j’y gagnerais quoi ? » Non non… Pour une raison obscure, il laisse planer le soupçon. Il laisse la mayonnaise monter. Et quand il décide ENFIN de se pointer, qu’un attentat lui tombe sur la tronche, attentat qu’on manque de lui foutre sur le dos en plus, est-ce qu’il change d’attitude ? Non. En même temps ce serait trop con. Il faut qu’il se batte avec Batman sinon le pitch du film s’écroule ! Donc il faut bien trouver un prétexte à l’homme-souris, aussi con soit-il. Ainsi il faudra donc se contenter d’un simple « Superman il fait quand même peur. Même s’il n’y a qu’1% de chance qu’il soit au final pas gentil, je préfère prendre 100% de risques pour chercher à le buter. » Oui oui… Batman. Bruce Wayne. Le mec dont on nous a dit qu’il était devenu Batman en domestiquant ses peurs. C'est bien lui qui ose nous sortir cet argument là... Et il a fallu presque deux heures pour trouver un prétexte au final aussi moisi. Mais bon, d’un autre côté, le prétexte de Superman pour aller se battre avec Batman vaut aussi son pesant d’or. Il doit se battre avec Batman parce que le méchant a kidnappé sa mère et qu’il la tuera si Superman ne lui obéit pas… Oui, vous avez bien lu : « la mère de Superman ». Le gars qui est capable d’aller au Moyen-Orient en moins de trois secondes pour sauver Loïs Lane dès qu’il sent une goutte de sueur froide couler le long de son joli petit dos, mais quand un torrent de sueur coule dans le dos de sa mère au coin de la rue de sa propre ville, il ne capte strictement rien ! Mais qu’à cela ne tienne ! Compte-t-il rattraper sa bourde en fonçant en une milliseconde là où un torrent inonde encore le dos de sa mère ? Eh bah non ! Il va aller se battre contre Batman ! Alors certes, on peut trouver que le combat vaut le coup d’œil (moi, perso, il m’a surtout décollé la rétine et rendu sourd, mais bon, passons), mais on peut aussi trouver ce combat incroyablement stupide, une fois de plus ! Le film ose quand même nous montrer que Batman a ramené avec lui une grosse lance de kryptonite pour occire le vilain extraterrestre qui ose voler en slip. On nous montre bien que l’ami Batou plante la fameuse lance sur le toit. Et pourtant, quand Superman apparait, la lance a disparu ! Batman préfère prendre plein de risques avec quelques petites capsules qui affaiblissent un peu Superman histoire qu’il puisse y avoir combat, et ce n’est qu’au final, une fois qu’ils sont passés à travers vingt-huit immeubles, que la lance refait soudainement son apparition, comme si Batman avait anticipé tout le combat et qu’il avait fait huit cents mètres deux heures plus tôt pour aller la planquer là où il le faudrait. Alors OK, j’entends bien : il fallait bien que ça castagne un peu. Mais bon, au moins trouvez une bonne raison, et réfléchissez un temps soit peu à la cohérence de la scène ! Avec un budget de 250 millions, je pense qu’on pouvait se permettre de payer un gars pour qu’il y réfléchisse un temps soit peu ! Parce que bon, si on avait réfléchi à ce combat, sûrement aurait-il trouvé une conclusion moins risible que celle que j’ai vu à l’écran ! « Va sauver Martha… - Ah bon ? Ta mère s’appelle Martha aussi ? Oh bah tu ne dois pas être un si mauvais bougre que ça alors ! Tiens prends ma main et soyons potes l’ami ! » Pour le coup, avec un Batman aussi conciliant, c’est d’autant plus con que Superman n’ait jamais daigné communiquer plus tôt, mais bon… Encore une fois, il fallait que le film ait lieu, qu’il offre plein d’immeubles qui pètent, des courses-poursuites, une Batmobile, un Batplain, des Avengers, un boss final à tête de Hulk numérique totalement dégueulasse, donc on a brodé comme on a pu…
Alors après, si encore c’était beau, ça aurait pu passer, mais même là-dessus, j’avoue que j’ai retrouvé cette réalisation de « Man of Steel » qui m’avait laissé à l'époque à moitié aveugle et à moitié sourd. Alors certes, on a quand même davantage de plans au trépied ou en travelling sur rail dans ce film, mais par contre, il faudra encore se coltiner des effets numériques à gogo qui rendent l'image plate et synthétique, des flares et des caméras qui gigotent régulièrement durant les scènes d'action, et surtout un montage d'hyperactif enfreignant systématiquement toutes les règles de cohérence spatiale. Donc, si j’ajoute à ça les interprétations soit totalement amorphes (Henry Cavill vs Ben Affleck : un duel au sommet en terme de transparence), soit irritantes au possible (la palme relevant à Jesse Eisenberg : pathétique de cabotinage !), ou bien encore tout le fond crypto-fasciste que l’ami Snyder ne se cache désormais même plus d’afficher dans ses films, j’ai quand même une multitude de raisons de vomir ce « Batman v Superman », et le mot n’est vraiment pas choisi au hasard. Mais bon voilà, comme quoi je sais parfois être magnanime, juste pour quelques plans iconiques, juste pour cette belle armure qui m’a laissé espérer pendant quelques mois un Batman plus noir que noir, je mets une petite étoile… Mais bon, pour le coup, elle aussi c’est l’étoile de la honte. Consternant…