Avec "Deux jours une nuit", les frères Dardenne propose un film social très fort et réussi. Si le schéma répétitif de la quête de Sandra amène des dialogues redondants quand elle s'adresse à ses différents collègues, le scénario se rattrape en variant les profils et les raisons de refuser ou d'accepter de soutenir Sandra, délivrant des portraits divers et représentatifs
(celle qui soutient Sandra en tant qu'amie, celui qui regrette son choix initial, l'égoïste, celle qui est influencée par son mari, le père et le fils dont l'avis diverge, celui qui veut faire sa terrasse, celui qui a déjà 2 boulots et a donc besoin de la prime, ceux qui ne veulent pas en parler soit parce qu'ils s'en foutent soit parce qu'ils ont honte, etc...)
. Surtout, ce pamphlet humain vise à montrer les difficultés d'une personne en situation de chômage
(l'humiliation de devoir quémander chez tout le monde, le découragement, l'impact sur la santé et la vie de couple tant au niveau sexuel que relationnel, la nécessité de protéger les enfants en leur cachant la vérité)
et en dit long sur la rudesse voire la cruauté du monde du travail
(double discours de la hiérarchie, concurrence déloyale, chantage exercé sur les travailleurs, la pression du CDD, le manque de considération pour les employés qui reviennent d'un congé maladie)
. Dans le rôle principal, Marion Cotillard est bluffante, elle montre tout son talent pour décrire l'ascenseur émotionnel permanent qu'elle vit et donne encore plus de relief à l'excellente issue choisie, entre réalité
(elle n'obtient pas gain de cause lors du vote)
et espoir
(elle refuse de sacrifier un collègue en difficulté pour retrouver sa place; rien que le fait de s'être battue lui a redonné goût à la vie et l'a remise en confiance)
. Enfin, la réalisation des frangins belges est toute en sobriété mais poignante, étant en permanence au service de cette histoire dense et bouleversante.