Il m’aura fallu presque un mois pour que je trouve une certaine motivation à aller voir ce film. Et encore ! A la base, je ne comptais même pas m’y risquer ! Je ne sais pas vous mais moi, quand j’ai vu la bande-annonce, je me suis tout de suite dit que ce film rentrait dans la droite ligne de ces œuvres moralisatrices, sentimentalistes et bien-pensantes. Or moi, ce genre de film là, je déteste au plus haut point. Et j’ai beau savoir que les bandes-annonces sont toujours trompeuses et formatées, là, pour ce cas précis, j’avais vraiment un faisceau d’images et de propos qui me semblait suffisamment large pour éjecter ce film de ma liste de potentiels visionnages… Et pourtant, il a seulement fallu quelques bons retours de proches pour que je m’y risque quand même… et à raison ! Parce que oui – ô surprise – ce film au final, il est loin d’être dégueu… Alors après, entendons-nous bien : ces « Figures de l’ombre » correspondent quand-même aux codes de ces classiques qui partent à la chasse à l’Oscar ! Oui il y a du bon-sentiment ; oui il y a du propos fort consensuel ; oui l’enrobage formel est très académique… Seulement voilà, malgré tout ça, j’ai trouvé l’équilibre global du film assez juste. Ça en fait un peu, mais ça n’en fait pas trop. Pour le coup, je trouve que la vraie astuce de ce film, c’est de ne pas s’être arrêté sur la seule question du militantisme noir. En sachant combiner cette question là à celle de la conquête spatiale, la question militante prend tout de suite une autre tournure. En fait, dans ce film, la lutte pour l’obtention d’un droit ne se limite pas à cette seule fin en soi, ici elle permet aux héroïnes de faire sauter les obstacles qui leur permettront d’atteindre leur réel objectif qui est de rattraper les Soviétiques dans la course à l’espace. Et ça pour moi c’est une subtilité qui fait vraiment la différence. Non pas que je considère la conquête des droits civiques comme un combat moins noble que la lutte contre le communisme. Ça non. C’est juste qu’en opérant ainsi, on parvient à changer de paradigme. On n’est plus vraiment dans une logique d’opposition basique entre des oppresseurs et des opprimés. Dans cette intrigue, on lutte contre une logique dans laquelle tout le monde est perdant. Opprimer des scientifiques hors-pair dans une quête vers une forme de progrès, en fin de compte ça fait perdre tout le monde, blancs comme noirs, hommes comme femmes. Et pour le coup je trouve ça assez malin que le film ne joue pas de la carte « ces femmes au fond sont les égales des hommes », mais plutôt sur le côté « au fond ces femmes là sont exceptionnelles et la société assume de s’en priver. » D’ailleurs, je trouve aussi très malin qu’au fond, on ne sache pas ce qui brime vraiment les héroïnes du film. Est-ce parce qu’elles sont femmes ? Est-ce parce qu’elles sont noires ? Est-ce parce qu’elles sont nouvelles dans leur domaine de compétence ? Est-ce tout cela à la fois ? Pour le coup le film brasse de manière assez malicieuse ces questions sans trop s’appesantir dessus car, au fond, le vrai enjeu, c’est se transcender pour progresser dans la conquête spatiale. Ainsi ce fut donc une première libération me concernant. A partir du moment où le film ne classe pas (trop) les personnages en gentils / méchants ; à partir du moment où on ne reste pas en démonstration toujours autour d’un même concept, le film rend sa démarche bien plus efficace. Et pour le coup, oui, « les Figures de l’ombre » est clairement un film efficace. Classique certes, didactique parfois, prévisible souvent, mais malgré tout il n’en reste pas moins agréable à regarder parce qu’il ne s’appesantit pas sur les choses. Limite, une fois dit ça, je ne vois pas ce que je pourrais dire davantage parce qu’au fond, au-delà de ça, il n’y a pas non plus mille choses à dire sur ce film. Pour le coup il n’y a pas de surprise par rapport à la bande-annonce. L’intrigue est attendue mais elle se regarde, donc why not ? Au fond, au milieu de ces tristes premiers mois de 2017, ces « Figures de l’ombre » se révèlent être un choix de sortie cinéma parmi les plus intéressants du moment. A bon entendeur donc…