D'emblée, un film sur la guerre du point de vue de l'équipage d'un tank Sherman, ça peut difficilement justifier un film à soi tout seul. Si encore le film profitait de cet aspect huis-clos pour mettre en scène des interactions pas communes (mais si, 5 braves gaillards -dont Brad Pitt- en sueur et les nerfs à vif dans un espace restreint, il y avait moyen..) qui chercheraient vraiment à dire quelque chose sur l'Homme (avec un H, pas sur les seuls personnages du film) à la manière d'un "Sunshine" dans un registre diamétralement opposé, là je serais le premier à défendre le projet, ce doit être parce que je reste bouche-bée devant ces huis-clos où les personnages passent la plupart de leur temps à causer. Mais cet aspect-là est absent de "Fury", surtout parce que les personnages sont rarement seuls hormis au tout début et à la fin. Ce n'est pas pour ça que le film est raté non plus, c'est juste de cette manière que j'aurais adoré orienter le scénario de "Fury" avec mes petites mains, mais en l'état on a tout de même droit à des personnages aux réactions parfois très humaines, notamment le personnage de Norman, je ne pense pas me tromper en disant que n'importe qui de nos jours ne se démerderait pas mieux si la guerre frappait à la porte demain. On peut pas contre déplorer une présence trop importante de la religion là-dedans jusqu'à surnommer un personnage "La Bible", ce qui ne dit rien de franchement intéressant et laisse du coup moins de temps aux vraies réactions humaines. En règle générale, le discours n'est pas différent de tout ce qu'on a déjà vu dans plein de films du même genre, mais reste plus ou moins efficace. Et au final, les scènes intimistes sont bien moins marquantes que le reste du film: celui-ci ayant le cul entre deux chaises nommée "réalisme" et "cliché", ces scènes sont dans le second bateau et ça se voit. Les scènes de guerre et revanche sont la grande force du film: crues, violentes et nerveuses, elles prennent direct aux tripes. L'esthétique très étudiée dans la saleté et la crasse, en plus d'offrir un travail assez remarquable sur l'ambiance presque post-apocalyptique que sert le film, y est l'occasion de quelques images puissantes: les balles traçantes qui fusent, un obus qui ricoche sur un char sans dévier sa trajectoire, l'impact lumineux des balles sur des cadavres cramés au phosphore...de ce point du vue là pas grand-chose à redire, même si le climax est finalement moins impactant que les 2 ou 3 autres scènes de bataille, puisque bien plus cliché et au dénouement plus attendu. Même si sans spoiler, David Ayer s'est fait plaisir pour filmer les morts à l'écran, de ce côté-là on sent l'enthousiasme
(big-up à La Bible dont ce qu'il reste de la cervelle sort par les orbites, amis du bon goût...)
. J'ai pas mal hésité entre 3 et 3,5 mais au final, la beauté crasseuse de l'ambiance l'a emporté de peu sur les pauses un peu chiantes dans le récit. Quel bon prince je fais, des fois.