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    Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère" et de son tournage !

    Le cours de Rivière

    René Allio s'est inspiré de l'ouvrage homonyme publié en 1973 par le philosophe Michel Foucault. Il s'agit d'un ouvrage collectif, rassemblant le témoignage de Pierre Rivière, rédigé par le jeune parricide en prison, et des contributions des membres du séminaire animé alors par Foucault au Collège de France. Ces recherches s'inscrivent dans le cadre de la réflexion menée par Michel Foucault dans les années 70 autour des thèmes de la répression et des normes sociales. Deux ans plus tard, il signera Surveiller et punir, un ouvrage de référence sur le système carcéral.

    Etre et avoir été

    Le documentariste Nicolas Philibert, assistant réalisateur sur Moi, Pierre Rivière..., consacrera trente ans plus tard un documentaire au tournage de ce long métrage. Dans ce film sorti en 2007 et intitulé Retour en Normandie, l'auteur d'Etre et avoir part à la rencontre des comédiens non-professionnels qui tenaient les rôles principaux du film de 1976. Précisons que Nicolas Philibert était à l'époque chargé du casting, en compagnie d'un autre futur réalisateur, Gérard Mordillat. Pascal Kané avait déjà réalisé un court documentaire sur le tournage du film de René Allio, mais il n'avait jamais été exploité en salles.

    Lieu de tournage

    Le film de René Allio a été tourné dans l’Orne (Basse-Normandie), à quelques kilomètres de l’endroit où s’est déroulé le drame du 3 juin 1835. 

    La parole est à l'accusé

    Dans un entretien réalisé par René Féret au moment de la sortie du film, Michel Foucault expliquait pourquoi il considérait le témoignage de Pierre Rivière comme un document "héroïque" : "Pour deux raisons : parce que soudain, quelqu'un prenait la parole alors que dans la plupart des autres documents ils ne parlaient jamais, on parlait d'eux, ou quand ils parlaient c'est parce qu'ils étaient interrogés, c'est parce que, pressés de questions, ils finissaient par avouer. Là, quelqu'un, le plus fragile sans doute, le plus anonyme, un petit paysan parle et parle de quelle manière : moi, Pierre Rivière... Et, de plus, dans cette affirmation héroïque, se montrait toute une parenté soulignée par Rivière lui-même, entre son acte et l'histoire proche, ancienne et proche, à laquelle il se rattachait. Ce lien entre la grande histoire et le moutonnement indéfini de ce qui se passe nous a beaucoup frappés."

    Allio marie documentaire et fiction

    Dans une longue note d'intention rédigée en marge de l'écriture du scénario, René Allio expliquait sa démarche : "Moi, Pierre Rivière... devra répondre à la fois aux besoins d'un film de documents et d'une fiction dramatique. La structure du récit renverra nécessairement à cette dernière, même si c'est en demeurant fidèle à l'exactitude documentaire et chronologique que nous y parvenons. On sait, en effet, que depuis la tragédie oedipienne, l'enquête policière demeure un des modèles fondamentaux de la représentation dramatique et tragique, et qu'elle a été adoptée telle quelle par le cinéma, où même elle a constitué à soi seul un genre bien typifié (...) C'est de cette double écriture, refondue en une forme spécifique, que notre film, en dehors de son contenu, du répertoire exceptionnel de personnages qu'il convoque, des scènes étonnantes qu'il appelle, devrait tenir une partie non négligeable de son originalité et c'est, du point de vue du scénario que nous écrivons comme de la réalisation qu'il demandera, ce qui nous propose aujourd'hui le challenge le plus passionnant."

    Ils sont de la revue

    René Allio a écrit le scénario de son film en compagnie de deux critiques des Cahiers du Cinéma, Serge Toubiana, le futur Directeur de la Cinémathèque française, qui était alors rédacteur en chef de la revue, et Pascal Bonitzer. Celui-ci deviendra un des plus fameux scénaristes de cinéma d'auteur français, à travers ses collaborations avec Rivette, Téchiné ou Raoul Ruiz, et passera lui-même derrière la caméra au milieu des années 90 (Encore, Rien sur Robert...).

    Artisanat et paysannerie

    Au moment de la sortie du film, René Allio revenait sur l'apport décisif qu'a représenté le travail avec des non-professionnels : "(...) nous ne pouvions pas deviner à quel point [cette aventure] deviendrait, mieux qu'un travail, une rencontre avec des hommes et des femmes dont la richesse de sentiments, la délicatesse d'esprit, la générosité de coeur, le rapport simple et direct aux choses du travail, à l'équipe, nous seraient un enseignement. Jamais d'ailleurs, nous n'avons eu le sentiment d'une différence ou d'un clivage dans le groupe que nous formions, et qui aurait mis les " techniciens " du cinéma un peu à part ; non, nous formions un tout entier où se répartissaient les tâches, celles du jeu, pas vécues autrement que les autres. À ces moments, on sait bien que faire un film n'est pas cette entreprise de hautetechnologie que l'on voudrait parfois nous faire accroire, mais un travail comme un autre, aussi manuel que le labourage, aussi artisanal que la menuiserie, aussi raffiné que la dentelle (...) Je n'ai pas demandé autre chose à nos interprètes paysans que ce que j'aurais demandé à des "professionnels" : faire acte de création."

    Foi de paysan...

    Comme la plupart des personnages du film, Pierre Rivière est interprété par un authentique paysan, comédien non-professionnel. Il s'agit de Claude Hébert, qui campera en 1979 le héros simplet de La Drôlesse de Jacques Doillon, un autre film inspiré d'un fait divers réel et situé dans le monde rural. Il apparaîtra dans une demi-douzaine d'autres films, avant d'abandonner sa carrière d'acteur au début des années 80 pour devenir prêtre.

    Face à l'Histoire

    Moi, Pierre Rivière... est le septième long métrage de René Allio, cinéaste, mais aussi décorateur et costumier pour le théâtre, et peintre. Né en 1924 et décédé en 1995, Allio, homme engagé, avait déjà représenté une page de l'Histoire dans Les Camisards en 1972.

    Mort par pendaison

    D’abord condamné à mort, Pierre Rivière vu sa peine être commuée par le roi Louis Philippe I. Condamné à perpétuité, le jeune homme se pendra finalement dans sa cellule de la prison de Beaulieu à Caen le 20 octobre 1840. Il avait alors 25 ans.

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