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ffred
1 728 abonnés
4 021 critiques
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3,5
Publiée le 4 mai 2022
Le récent Bruno Reidal m’avait fortement fait penser à ce film de René Allio vu il a très longtemps. Et comme les deux films sont construit sur à peu près le même principe, curieux de le revoir. Celui-ci a bien vieilli mais reste intéressant et prenant. On a plus l’impression de voir un documentaire et tous les acteurs sont non professionnels. Une curiosité.
En 1976, René Allio met en scène le témoignage de Pierre Rivière paysan auteur d'un parricide en 1835.
Ce témoignage avait retenu l'attention du professeur de philosophie Michel Foucault qui avait redécouvert quelque temps auparavant ce texte à l'occasion de recherches effectuées pour la rédaction d'un de ses ouvrages.
Que présentait ce texte de Pierre Rivière de si remarquable ? L'assassin qui était considéré comme idiot par son entourage avait montré des qualités d'écriture étonnantes peu compatibles avec son état de retard mental supposé.
Dans son texte , Rivière explique les circonstances qui le conduisirent à tuer sa mère, sa sœur et son frère.
Son but était de délivrer son père de la tyrannie de sa femme qui au vu des descriptions qu'il en fait, corroborées par des témoignages de sources diverses, relevait de la psychiatrie ou tout du moins manifestait un comportement toxique extreme pour son entourage. Rivière entraîna son frère et sa sœur dans la mort car il leur reprochait leur proximité injustifiable, selon lui, avec leur mère.
Réalisé avec un casting composé de nombreux acteurs non professionnels ( dont le personnage principal) et tourné dans la région ou les crimes furent commis, avec peu de moyens, le film est absolument remarquable.
Le naturalisme et le naturel sont rendus avec précision et si l'on ne craignait pas l'anachronisme on pourrait presque évoquer l'aspect documentaire de l'opus de Rene Allio.
C'est un très grand film dont le retentissement ne s'est pas éteint avec le temps, puisque récemment ( 2022) Vincent Leport proposait un film intitulé " Bruno Reidal" très inspiré par la méthode employée par Allio avec Pierre Rivière, sur la base d'un thème voisin.
Pour le commun des mortels, il est coutume de considérer comme antinomique l'intelligence et la folie. Ce n'est aucunement le cas, comme le souligne ce film ( ainsi que d'ailleurs celui de Vincent Leport).
La seule réserve que je ferais concerne la diction des trois acteurs principaux qui incarnent Pierre Rivière , son père et sa mère.
L'actrice n'est pratiquement jamais compréhensible, le père pas toujours et Claude Hebert non plus lorsque en voix off, il lit le texte écrit en prison par Pierre Rivière.
C'est un aspect dommageable pour le spectateur attentif. Des sous-titres auraient été les bienvenus.
A l'intention du spectateur éventuel, le film est réservé au spectateur intéressé par le cinéma d'auteur.
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4,0
Publiée le 7 juin 2021
Donnons au film son titre complet Moi, Pierre Rivière, ayant massacré ma mère, ma sœur et mon frère. Le film de René Allio doit être l'une des œuvres cinématographiques les plus négligées et méconnues de l'histoire. Il raconte l'histoire vraie d'un paysan de Normandie en 1835 qui apparemment sans raison a massacré de sang-froid la majorité de sa famille. Dans l'attente de son procès Rivière a rédigé un récit complet et détaillé de ses débuts et des événements qui ont conduit au meurtre et de son bref passage en tant que hors-la-loi. Pour un fermier apparemment sans instruction ce récit a été considéré comme une œuvre littéraire remarquable. En 1973 le philosophe Michel Foucault a rassemblé la déclaration de Rivière ainsi que diverses sources restantes de l'affaire. Rivière n'est pas seulement un étrange psychopathe. Le film pose les mêmes questions que celles qui ont été posées par les enquêteurs psychologues chargés de son cas en 1836. Rivière pourrait être victime d'une aliénation sociale. Ou peut-être s'agit-il d'un moment de folie provoqué par des années de torture infligées par sa mère. Il est également suggéré que Rivière a pu se forger une mentalité misogyne en absorbant divers textes littéraires et en raison de sa peur générale des femmes. Ce film ne manquera pas de susciter des discussions et restera probablement gravé dans votre mémoire pendant très longtemps...
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3,5
Publiée le 15 février 2017
Pour qui connait Renè Allio (un cinèaste à redècouvrir absolument), ses films ètaient nettement marquès par sa formation de peintre, de dècorateur de thèâtre et de scènographe, mais aussi par l'influence du cèlèbre dramaturge Bertolt Brecht! Sorti en 1976, "Moi, Pierre Rivière, ayant ègorgè ma mère, ma soeur et mon frère" est le sixième long-mètrage de son auteur! D'une grande intelligence d'analyse et filmique, c'est une oeuvre dure, conçue comme telle, avec une excellente reconstitution du monde paysan du XIXe siècle! Ce qu'il y a de fascinant dans le livre prèsentè par Michel Foucault, c'est le texte de Pierre Rivière lui-même! C'est à dire le texte de ce petit paysan de Normandie, dans sa vingtième annèe, que l'on considèrait dans son village comme un demeurè alors qu'il ètait loin d'être un imbècile! Pierre Rivière explique au fond que ce crime abominable, il l'a commis à partir d'un texte qu'il n'a pas ècrit parce que les circonstances ne lui ont pas permis de le faire mais qu'il ètait tout entier dans son esprit! Au fond, le texte a prècèdè le crime [...] Claude Hèbert, que l'on a pu voir par la suite dans "La drôlesse", est remarquable de naturel dans un rôle difficile! Sans lui, le film d'Allio ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui...
Filmé principalement avec des non professionnels, ce film de René Allio de 1976 est un film qui a marqué les esprits. Les personnages ont vraiment existé. Comme l'indique d'emblée le titre Pierre tue sa mère ainsi sa sœur et son frère. Doit-on déclarer le le fils fou et l'enfermer à l'asile d'aliéné ou le punir comme parricide ? Le fils parricide écrit un long mémoire d'explication de son geste que le réalisateur utilise comme armature du film. On est frappé par le niveau de langue utilisé par le jeune paysan en contraste avec le parlé local également reproduit par Allio. Nous sommes dans le bocage normand en 1835 avec un couple de paysans marié pour éviter la conscription du mari. La femme veut s'émanciper mais elle ne peut divorcer. Le réalisateur ne le précise pas mais le divorce à été aboli en 1816. Elle n'a aucune envie d'aller vivre chez sa belle-mère. Pourtant la coutume et loi lui imposent de vivre avec son mari et de lui laisser l'usufruit de ses biens. Elle demande la séparation mais l'institution préfère le statu-quo. Dans le déchirement entre les deux époux le fils prend le parti du père. le manque d'autorité du père finit par lui être insupportable. Un fort intéressant film car qui est responsable à la fin ? La société en empêchant le divorce ou l'individu pris dans les contraintes des normes sociales ? L'absence de traitement psychanalytique qui aboutit au passage à l'acte ? En donnant la parole à l'accusé Allio nous fait réfléchir sur les normes sociales à travers un docu-fiction superbement réalisé.
Avec rigueur et distance, ce film met en images les procès verbaux de l'époque et les confessions du meurtrier. René Allio ne se permet ici aucun artifice, aucun jugement. Son récit est brut, austère. Mais il laisse sourdre une émotion d'une rare profondeur. On n'est pas prêt d'oublier les mots simples, forts (et d'une étonnante qualité littéraire) de Pierre Rivière. Lui qui a sacrifié une partie de sa famille (et qui s'est sacrifié) pour libérer son père de l'emprise de son épouse et lui permettre d'être enfin heureux. On n'est pas prêt d'oublier le visage de l'acteur Claude Hébert (non professionnel, comme la plupart des interprètes), à la fois innocent et farouche. On n'oubliera pas non plus ce tableau juste et dur de la vie paysanne au XIXe siècle. Au-delà de la question de la responsabilité des crimes (lucidité ou folie ?), c'est le drame social qui prime dans ce film. Et l'acte d'amour et de mort d'un jeune homme fragile.
Un film absolument saisissant, dont le sujet lui-même est problématique : Peut-on excuser l'impardonnable ? Qu'est-ce que, au final, décrit le mieux l'humain ? L'impossibilité que l'on a à le définir ? Son humanité profonde ? Sa faculté à réaliser l'impensable ?
De plus, le fim, tiré d'une histoire vraie, s'appuie sur un certain nombre de pièces à conviction d'époque, le tout pour un résultat époustouflant : on en vient à ne plus savoir quoi penser, quand le penser, ni pourquoi ces certitudes s'ancrent en nous malgré leur manque évident de cohérence dans un "cadre classique".
Et qui, au final, nous pousse à nous interroger sur nous-mêmes : si nous sommes capables de comprendre un tel geste, ne serions-nous pas également capable de le commettre ?
Un film très intéressant et très riche d'un point de vue psychologique, mais également très touchant et très beau à voir.
Un bon docu-fiction très bien réalisé pour l'époque qui nous dresse la vie de Pierre Rivière, reconnu coupable d'avoir égorgé un epartie de sa famille. Le sujet est traité sans manicheisme, ce qui en fait sa force.