Bon, voilà un petit polar chinois qui tout en assurant à peu près le divertissement n’est malheureusement pas vraiment à la hauteur de son sujet. Pour ma part j’ai apprécié que le film se veuille radical, violent, rugueux. Il ne fait pas dans l’euphémisme, on est dans un gang, les personnages sont noirs, visqueux, sans scrupule, qu’ils aient 10 ou 30 ans, qu’ils soient en bas ou en haut de l’échelle. Le film dégage une vraie noirceur avec des scènes violentes, des meurtres, des viols, sans forcément d’ailleurs exagérer l’aspect graphique. Bref, ça c’est appréciable. De même, j’ai apprécié l’ambiance rétro, cette plongée dans les années 80-90, plutôt bien restitué même si on sent des moyens limités pour aller vraiment plus loin dans la création de décors et pour naviguer dans le quartier de Flushing. 5 millions de dollars, c’est pas grand-chose faut dire !
Par ailleurs, le film est court, ce qui entretient le rythme, et il s’attache aussi à ses personnages. Faut de spectaculaire, il essaye de donner de l’épaisseur plutôt à travers les rapports psychologiques des personnages, leurs failles, leur ambiguité, leur violence, leur amour parfois. Ca entretient le principal intérêt du métrage à mon sens.
Pour le reste, ce qui m’a assez déçu c’est la réalisation. Les deux réalisateurs (Lau et Loo !) en font des caisses avec les effets de style, les ralentis notamment, le montage se veut parfois prétentieux avec un côté clipesque inutile, il y a un côté lourd et alambiqué dans la réalisation comme pour donner un style plus auteurisant à un métrage qui n’avait pas besoin de ça pour exister. Les scènes d’action perdent en efficacité à cause de ça, et cette stylisation finit par faire sourire.
Côté acteurs, comme souvent dans le cinéma asiatique il y a du surjeu à gogo ! Heureusement, comme le film est aussi un peu américain, certains interprètes échappent à cet écueil, notamment Harry Shum, très sobre et crédible en mafieux, et Justin Chon arrive à être également plutôt juste. Shuya Chang apporte une touche d’émotion bienvenue et elle fait preuve d’une certaine subtilité qu’on appréciera toutefois en version originale car le doublage français est un peu pourri ! On notera la présence malheureusement très anecdotique de Ray Liotta.
C’est d’ailleurs un souci du film, la dimension enquête qui est complètement inutile. On se demande presque pourquoi on nous l’esquisse, car au final elle nous est rappelée de façon régulière mais n’a aucune consistance et les nombreux enquêteurs (quatre quand même !) sont totalement vides.
Le scénario du reste décevra sans doute un peu. Outre l’enquête, on ne sent pas forcément une documentation très précise sur la constitution et la manière d’exister de ces gangs asiatiques à cette époque. On ne connait pourtant pas très bien ce milieu, il y avait de quoi faire mieux de mon point de vue. Le film fait plus série B que grand film mafieux à la Scorsese sur le milieu de la mafia asiatique, et c’est dommage.
Maintenant, si vous recherchez un petit divertissement roublard et violent, La Revanche des dragons verts vous plaira peut-être. De mon point de vue, ça reste un Lau mineur, qui tient surtout grâce au soin apporté à ses personnages principaux, à leurs relations, à leur état d’esprit, qui vient doper un métrage pour le reste faible à moyen. 2.5