Film d’anticipation mais aussi un Western, le premier essai de Jake Paltrow, pour l’anecdote le frère d’une célèbre actrice, Gwynett, démontre aussi bien un florilège de bonnes idées que toutes les approximations d’un cinéma inexpérimenté. Le jeune réalisateur s’emploie partout à mystifier son univers, des étendus arides, un monde semi-apocalyptique, en usant pour ce faire d’excellents comédiens, notamment le moteur que peut être Michael Shannon et un Nicholas Hoult transfiguré. L’essai, d’une part, est satisfaisant, d’une autre part plutôt mitigé. L’ambition affichée par Jake Paltrow renvoie aux grands films d’anticipation de jadis, monstres de cinéma qui renvoyaient l’humanité à ses instincts primaires, alors que la technologie évolutive n’était qu’une forme de mise en lumière du futur. Si ici les robots intelligents côtoient les hommes, c’est pourtant dans un monde rétrograde, ou la pluie ne tombe plus et ou la sécheresse prétérite la survie. Mais comme dans toute production similaire, les nantis ont pourtant un moyen de subsistance, soit des conduits leurs amenant le peu d’eau restante, croupie sous la roche.
La jalousie, l’opportunisme et la cruauté sont au centre du récit. Décalque d’un Western traditionnel, Young Ones ne démontre aucune errance en termes d’inspirations. Le réalisateur fait le boulot, pour ce qui est d’imaginer, de créer. Mais celui-ci peine pour autant à assumer son rôle de chef, de leader, et laisse à maintes reprises son film s’égarer sur les sentiers de l’approximation. Les acteurs, souvent laissés seuls face à la responsabilité d’incarner des personnages ambigus, des individus particuliers, tombent parfois dans le piège tendu par l’inexpérience du metteur en scène. On sent l’ambition, les velléités de toute cette petite troupe mais les caméras de Paltrow ne rendent pas systématiquement les émotions, parfois se perdant là où elles ne devraient pas aller. Ce mal est sans conteste l’un des symptômes majeurs du cinéma d’expérimentation, non pas comme genre, mais comme premiers films de cinéastes ambitieux.
Les errances du metteur en scène, de son scénariste, n’empêche pas la construction d’un univers intriguant, désertique, chaotique mais aussi très singulier. Tourné en Afrique du Sud, Young Ones démontre que les décors naturels restent et resteront des valeurs indissociables de la qualité visuelle au cinéma. La photographie est ici saisissante. L’évolution des protagonistes dans ce bout de terre sans la moindre goutte d’eau amène quelques très belles séquences de mise à l’épreuve, de débrouillardise, notamment lorsque l’actrice Elle Fanning s’emploie à faire sa vaisselle avec de la terre sèche. Oui, Young Ones ne manque pas de bonnes idées, la première étant ce robot mulet, animal mécatronique de compagnie, témoin des évènements, sombres ou joyeux, et encore source de conflits.
Mais celui qui, dans le fond, s’en sort le mieux coté casting, c’est le tout jeune Cody Smit McPhee, roublard, mélancolique et finalement prompt à rétablir l’ordre, par le force. Le jeune comédien entre vraiment, avec ce rôle, dans le monde de l’interprétation pour adultes, une aubaine pour le jeune homme qui verra sans doute sa carrière devoir beaucoup à Jake Paltrow. Bref, du bon, du très bon, mais aussi du mauvais, du décevant. En somme un film tout ce qu’il y a de plus moyen, qui interroge sur sa légitimité mais offre quelques beaux moments de cinéma. 10/20