Quand on rentre dans le film dès les premières minutes, sans en connaître le synopsis, rien ne laissait présager d'une telle intrigue. Celle d'un contremaître de chantier, qui, après le boulot, décide de faire un détour inhabituel, au risque de chambouler sa propre vie professionnelle et personnelle. On suit alors le trajet d'Ivan Locke, campé par un incroyable Tom Hardy (est-il encore nécessaire de le préciser), quasiment en temps réel (1h25), parcourant l'autoroute à travers l'Angleterre dans un but bien précis. Il est question d'honneur, de rédemption, d'introspection, de remise en cause. Et cela, à travers les échanges entre Locke, seul personnage visible du film, et ses différents interlocuteurs par téléphone (compagne, enfants, collègues...). La grande prouesse de "Locke" c'est de captiver, de faire du spectateur un acteur à part entière, comme si on était avec lui dans la voiture tout du long. A aucun moment, l'ennui se fait sentir, car les conversations simultanées au téléphone apportent leur lot de surprises, de tension, d'émotions, parfois d'angoisse. On vit l'histoire avec lui.
Bien sûr la forme laisse par moment à désirer, car le cadrage en seulement trois plans de caméra différent
(dans l'habitacle d'une voiture)
peut rendre la réalisation monotone, mais Steven Knight, en misant sur l'audace de son projet, et la densité de son intrigue, gomme ces quelques imperfections. D'ailleurs, certains plans plus contemplatifs évoquent le Collatéral de Michael Mann.
Le point fort de "Locke" : son interprétation ! La prestation honorable de Tom Hardy portant vraiment le film sur ses épaules, ajoutée à l'interprétation par téléphone des autres acteurs, dont on entend forcément que la voix, dénotent d'une grosse performance (notamment celle d'Andrew Scott en collègue paniqué).
Ceci dit, "Locke" est une expérience à vivre, à condition de rentrer dans l'histoire. Steven Knight a, en tout cas, fait preuve d'audace et d'ambition. Tandis que Tom Hardy montre encore une fois qu'il sait bien choisir ses rôles, prendre des risques, et surtout réaliser de grosses performances, aussi bien dans des blockbusters (Mad Max, TDKR) que dans des films plus intimistes (The Drop).