Locke de Steven Knight. Le pitch : un contremaitre expert en béton quitte son chantier un soir de match. Le lendemain c’est une grande journée...c’est LA journée de sa carrière car une énorme quantité de béton arrive sur son site afin d’ériger le plus grand bâtiment d’Europe, et il en est responsable. Au lieu de rentrer chez lui, retrouver sa femme et ses deux enfants, il roule sur l’autoroute, vers une destination inconnue.
C’est la semaine des prouesses cinématographiques : après Boyhood et son tournage étalé sur 12 ans, voici Locke, un film à un seul personnage visible, un mec dans sa voiture pendant une heure trente (qu’on ne sent pas passer), correspondant avec une poignée de personnes au téléphone.
Alfred Hitchcock avait eu l’idée d’un film se déroulant entièrement dans une cabine téléphonique. J’ai d’emblée pensé à cela au bout de quelques minutes, comprenant que l’on ne sortirait jamais de cette BMW-téléphonique. Et ça fonctionne ! Parfaitement même ! Il y a des éléments de suspense qui font que cette anti-action s’accélère par moments, mais l’élément crucial de ce film reste Tom Hardy, que l’on savait être un excellent acteur, qui devient ici un immense comédien. La formule est galvaudée, mais prend ici tout son sens, Tom Hardy porte le film sur ses épaules, à bout de bras, à bout de ce que vous voulez ! Son interprétation est parfaite, intelligente, sans gras, qui nous permet de voir tout ce qui se déroule off sans jamais sortir de cette voiture. L’action se déroule en temps réel, en une heure trente donc, et pose de sacrées questions sur l’honneur, la place de chacun entre vie professionnelle et vie privée, sur les fautes commises, petites, grandes, et la responsabilité de chacun.
Un dernier mot sur l’ambiance dans la salle : samedi après midi, UGC les Halles, 16 heures. Salle aux trois quart pleine, testostéronéé au max, avec des individus dont on sent qu’ils sont fans de Fast and Furious» et qui imaginent qu’ils vont voir avec «Locke» un genre de «Drive» nouvelle version.» Ah ah ah ! Quel bonheur que tous ces ronflements, ces interrogations émises à haute voix «C’est quoi ce film ?», ces fauteuils qui grincent sous le poids des changements de position, ces respirations bruyantes qui définissent trop bien l’ennui et l’incompréhension, puis forcément les sorties, une par une, à la queue leuleu. Je jubile...et recommande vivement.