Arf ! J’ai l’impression d’être sévère avec le pauvre Gareth Edwards, mais franchement, je ne vois pas comment je pouvais aller au-delà de deux étoiles pour son insipide « Rogue One ». En même temps, les dés étaient un peu pipés d’avance : comment un tel projet, aussi lamentable dans sa conception, pouvait seulement espérer tenir la route ? Poser là un morceau d’intrigue dont tu connais déjà la conclusion – qui plus est en plein milieu de la saga ! – franchement, je ne vois pas ce que ça pouvait apporter de vraiment intéressant. Or, pour le coup, niveau intrigue, effectivement ce « Rogue One » ne déjoue pas les prédictions. Les personnages sont lisses ; leur background pas fouillé du tout ; leurs motivations souvent chimériques. (Entre une héroïne qui semble risquer sa peau juste pour réhabiliter son père, un Frédéric Diefenthal hispano incapable d’exister à l’écran, et un Donnie Yen transmuté en une sorte de mystique tibétain de la force, je trouve quand même qu’on touche bien le fond.) Alors après, OK, c’est vrai qu’habituellement dans « Star Wars », les personnages ne se limitent souvent qu’à quelques traits simplistes aisément identifiables. Mais pour moi, dans un « Star Wars » habituel, ce n’est pas forcément un problème, puisque ce qu’on attend avant tout, c’est de voir se réaliser le schéma narratif habituel de quête initiatique, simple prétexte à la découverte de la logique de cet univers. Là, avec « Rogue One », l’univers est connu ; la conclusion est connue ; tout est connu. Du coup on sait très bien que ce film ne va apporter aucun élément fondamental à la mythologie parce que derrière, la suite est déjà écrite. Et encore une fois, je suis presque désolé à l’égard de Gareth Edwards de ne mettre que deux étoiles à son « Rogue One » car au final, je trouve qu’il a fait le maximum de ce qui pouvait être fait. Je m’étonne même d’avoir trouvé au milieu de cet ennui pas mal de points de réjouissance. Tout d’abord, j’ai notamment apprécié le fait que ce film profite de l’absence manifeste d’enjeu pour apporter à cette saga polymorphe toutes les rustines nécessaires qui pourraient permettre une réunification dans tout ça, autant que cela. D’un côté il le fait au travers du scénario, parce que l’air de rien « Rogue One » pose la transition de l’âge d’or de la prélogie au côté usé de la trilogie originelle ; il esquisse le déclin des droïdes ; et il justifie même
l’absurde vulnérabilité qu’avait l’Etoile noire dans l’épisode IV
. De l’autre côté, il le fait aussi au travers de sa forme. Les décors, les lieux visités, et même les effets visuels rendent vraiment justice aux deux trilogies, avec un soin particulièrement consommé. C’est même d’ailleurs sur ce point que ce « Rogue One » tire l’essentiel de ses mérites. L’air de rien, il offre quelques plans vraiment magnifiques de l’Etoile noire, des croiseurs (
notamment celui qui stationne au-dessus de Jedha
) voire même il sait rendre justice à certains personnages de l’épisode IV Beau boulot accompli notamment sur le Grand Moff Tarkin. Techniquement ce n’est pas parfait (même si s’en est pas loin), mais d’un point de vue intrigue, je trouve que ça permet d’étoffer un personnage trop rapidement expédié par l’épisode IV. Idem pour Vador, dont le positionnement en retrait est totalement cohérent par rapport à ce qui en était montré dans ce même épisode IV. Pour le coup « chapeau » : je trouve que le taf a au moins ce grand mérite de la cohérence. Et puis même si quelques planètes sont expédiées au départ, je trouve qu’avec Jedha mais surtout Scarif, « Rogue One » parvient à faire ce que Star Wars VII n’était pas parvenu à accomplir : il a enrichi l’univers de la saga. La
cité de Jedha
comme
la tour d’archives de l’Empire
sont vraiment deux éléments au pouvoir iconique fort et – rien que pour cela – l’épisode parvient à ne pas sombrer dans la plus totale des inutilités. Mais bon, encore une fois, voilà qui est bien peu par rapport à ce que la licence « Star Wars » implique. Avoir un épisode insipide, sans enjeu, et sans personnage, cette saga n’en avait clairement pas besoin. Et même si ce « Rogue One » se distingue de l’odieuse prélogie du simple fait qu’il soit soigné n’en fait pas pour autant un épisode qui sert la cause. Donc bref, Disney – pitié ! – épargne nous ce genre de démarche à l’avenir si jamais tu ne veux pas voir « Star Wars » devenir aussi imbuvable que le Marvel Comics Universe, et cela pour les mêmes raisons… A bon entendeur j’espère…