Cela a beau remonter à loin maintenant, je garde un très bon souvenir du premier "Tigre et Dragon". Malgré que la mise en scène de Ang Lee s'emballait parfois dans des gestes assez tape à l'oeil, le long-métrage parvenait à être d'un lyrisme fou dans de nombreuses séquences. Alors lorsque l'on annonce une suite, plus de dix ans après le sortie de premier volet, mise en scène par Yuen Woo-ping, un chorégraphe que j'adore, l'impatience et la réticence se confonde. J'aurais du m'abstenir.
Car voir un film, et un genre de manière générale, aussi noble se travestir en un ersatz de Avengers c'est douloureux. On pourrait me rétorquer que le film de Ang Lee était déjà très occidentalisé, ce qui est vrai, mais avec "Sword of Destiny" le public visé est clairement l'américain moyen consommateur de Netflix. Le long-métrage se paie tout de même le luxe d'être tourné en anglais. Quelle intérêt ? Ce choix fait perdre en crédibilité et la musicalité de la langue. C'est d'une tristesse.
Mais encore, si ce choix était un service d'un divertissement efficace qui parvient à créer un peu de beauté au sein de ses scènes, pourquoi pas ? Sauf que cela n'est pas le cas. Au bout de 10 minutes le récit est déjà incompréhensible dû à un trop plein de sous-histoires inintéressantes et clichés. En parlant de clichés : les personnages sont risibles à un point suffisamment rare pour être souligné.
Cependant, et j'ai l'impression de me répéter à chaque fois, tout cela c'est anecdotique à la limite, si la mise en scène suit on peut toujours espérer un long-métrage, au pire, efficace, au mieux vraiment viscéral. Malheureusement, Woo-ping a beau être un chorégraphe de très grand talent, c'est un metteur en scène assez médiocre. L'histoire n'est déjà pas passionnante, mais sa mise en image, avec tout ce que le film comprend d'effets tape à l'oeil, de montage catastrophique et d'un profond manque de lyrisme, rend le tout navrant. Le cinéaste ne parvient pas à rendre quoi que ce soit efficace surtout que, et cela me fait de la peine de devoir relever un aspect technique aussi minime, les effets spéciaux sont d'une laideur incroyable.
Le résultat est mauvais, et c'est à la fois dommage, car le long-métrage aurait pu ouvrir le wu xia pian au public américain, mais était très prévisible. En effet, une suite qui sort plus de dix ans après le film d'origine, et pour une plateforme de vidéo à la demande, cela ressemble plus à une manière d'avoir sa petite exclusivité sans saveur qu'à une vraie volonté artistique.