Love is Strange : L’amour est étrange. Sans être autobiographique, c’est dans son propre vécu et dans celui de ces amis qu’Ira Sachs est allé puiser la matière de son dernier film, et c’est une chanson des années 50 qui lui donne son titre. Dès les premières images du film, nous faisons connaissance avec Ben et George, se réveillant côte à côte. C’est le matin de leur mariage. Ben a 71 ans, il est retraité, George doit avoir une petite dizaine d’années en moins, il est professeur de musique dans une école catholique. Ils sont ensemble depuis 39 ans. Bien que l’homosexualité de George et sa vie en couple soient connues de sa hiérarchie et de la plupart des parents d’élèves, la situation, acceptée jusqu’alors, évolue très défavorablement du fait de ce mariage : George est licencié. Conséquences : vente de leur appartement par manque de revenus, obligation de se séparer, provisoirement pensent-ils, pour aller vivre chacun de son côté. Ben, accueilli par son neveu Elliot et, Kate, la femme de ce dernier, se retrouve à partager la chambre de son petit neveu Joey. George, quant à lui, reste dans leur ancien immeuble, couchant sur le canapé du salon chez Roberto et Ted, deux policiers vivant en couple. La complicité qui les lie rend d’autant plus difficile à vivre cette séparation qu’ils espèrent très brève. Certes, ils auraient pu rester ensemble chez une amie pouvant les loger tous les deux, mais Poughkeepsie est à 2 heures de New-York, rendant difficile la recherche d’un nouveau travail pour George ainsi que celle d’un nouvel appartement compatible avec leurs revenus. C’est par de tels biais qu’Ira Sachs aborde de façon très fine les sujets qui viennent se greffer sur le sujet principal : la société catholique qui continue de s’opposer au mariage homosexuel, le prix des logements à New-York, le combat des homosexuels pour se faire servir dans des bars lorsqu’ils arrivent en couple, l’évolution d’un adolescent, Joey, son amitié ambiguë avec son condisciple Vlad et son premier flirt avec une fille de son âge. Musicalement, cette excellente comédie dramatique douce-amère est avant tout bercée par le piano de Chopin