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weihnachtsmann
1 141 abonnés
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4,0
Publiée le 4 décembre 2019
Le drame de ce film c’est de pouvoir dire dans la même séquence: je pars, et, je voudrais construire un fossé autour de la maison où nous ne vivrions que tous les deux. Un beau drame sentimental qui se rapproche de Sirk sans atteindre malgré tout le sacrifice total du mélodrame. L’amour n’a pas le dernier mot face à la raison mais les convenances lui font faire un choix qui s’apparente à une nouvelle vie... Alors pourquoi pas faire ce saut dans le vide.
Ce film se situe exactement entre Minnelli et Sirk auquel il emprunte le meilleur et ne verse ni dans l’excès dramatique ni dans l’excès artificiel. Il demeure en permanence dans la vérité du quotidien des personnes ayant eu la chance d’accéder à un entourage suffisamment aisé. Il est beau, lumineux, intelligent et riche d’enseignement pour les jeunes intellectuels. Il est sentimentalement profond et émouvant, bref, il est quasiment parfait. Richard Quine n’est pas n’importe qui et le fait d’avoir réussi entre autres, un film noir aussi juste que ‘’Pushover’’ et une comédie musicale aussi emballante que ‘’My sister Eileen’’ en est une preuve absolue. Il y a dans ‘’ Strangers when we meet’’ une dizaine de plans qui coupent la respiration en mettant en lumière la force des sentiments éprouvés par les deux amants. Inutile d’ajouter l’exceptionnelle qualité des acteurs, tous étant au top de ce que Quine leur demandait.
Bien avant David Lynch, Sam Mendes ou même Tim Burton, Douglas Sirk, sous des gros effets mélodramatiques et une mise en scène sophistiquée et chatoyante à l'extrême, l'air de rien avait commencé à critiquer les éternelles banlieues américaines qui sous une apparence lisse et proprette sont des nids idéaux pour l'hypocrisie, le puritanisme et la frustration. Richard Quine suit de peu Douglas Sirk dans cette critique à la différence qu'il préfère utiliser la sobriété comme arme, en gommant au maximum les effets mélodramatiques. Il a en outre le mérite d'éviter le moralisme à deux balles quand il aborde l'adultère ; d'ailleurs le seul personnage qui entrave réellement ce dernier est un frustré... Autre mérite, celui d'éviter la caricature en particulier en ne nous sortant pas les stéréotypes de l'épouse mégère et de la maîtresse femme parfaite mais au contraire en nous mettant face pour la première à une femme aimante et qui croit sincèrement aider son mari en le poussant à être le plus ambitieux possible sans comprendre qu'il a d'autres aspirations. Elle parvient même à être émouvante sur la fin du film. Quand à celui de la femme adultérine joué par Kim Novak si elle est malheureuse en couple, c'est parce qu'elle s'est mariée avec le premier venu pour vivre loin de sa mère qu'elle jugeait de mœurs trop libres. Kirk Douglas préfigure remarquablement son personnage d'homme d'affaires riche qui pètent les plombs de "L'Arrangement" et montre encore une fois qu'il est totalement à l'aise dans un registre sensible, la sublime Kim Novak (tellement sublime qu'à moins d'être un homosexuel refoulé, on ne peut trouver aucune excuse à son mari dans le film de rester insensible à son charme !!!) n'a jamais montré avec autant de délicatesse une certaine fragilité. On signalera aussi une réplique dont le côté plus qu'explicite détonne dans un film de cette époque, et qui prouve que l'agonie du Code Hays était déjà bien entamée, "I want make love to you", et une fin sobrement déchirante pour ce très beau film d'amour. Loin d'être un grand fan de Richard Quine, que je trouve bon cinéaste sans plus ayant en outre quelques fois flirter avec le très mauvais (je vous mets au défi de regarder "Train, amour et crustacés" sans avoir envie d'exploser votre télé !!!), j'ai eu l'agréable surprise de voir que sa filmo compte au moins deux excellents films : "L'Inquiétante Dame en noir" (avec aussi Kim Novak !!!) et celui-ci.
Caine78> Tu sembles avoir déjà poste pas mal de critiques mais j'estime que celle-ci du moins n'est pas a la hauteur. La phrase que j'ai remarquée dans ton texte " les dialogues se révélant même assez peu percutants". Excuses-moi mais "-What do you want? -I want to make love with you!! (en plus c'est dit d'une manière très appuyé avec les yeux), si ça ce n'est pas un dialogue percutant alors c'est quoi un dialogue percutant? Tu as souvent l'occasion d'entendre cette phrase venant de quelqu'un en chair et en os? Si oui, tu as bien de la chance. Parce que moi, j'aimerai bien. C'est 100 fois plus fort qu'une scène de baiser (quoique ça peut se discuter). Je suis d'ailleurs convaincu que la censure a tique en voyant ce passage mais l'a laisse tellement c’était beau émotionnellement et cinématographiquement parlant. C'est bien simple: si ce film étais passe au Festival de Cannes de cette année, je lui aurais donne la Palme d'or.
Richard Quine est surtout connu à Hollywood pour ses comédies légères. Ici il s'essaye au mélo à la Douglas Sirk ou plutôt à la Minnelli. Le tout p eut paraître un peu figé mais il faut se souvenir du contexte de l'époque où le sexe et les rapports au sein du couple devaient être montrés avec la plus grande chasteté (difficile non !). Cela n'empêche pas Quine au-delà de l'aimable ennui que distille de temps à autre son film de dresser un portrait féroce de la bourgeoisie américaine des fifties engoncée dans ses convenances. Douglas architecte autrefois en vue se lance à corps perdu dans une relation passionnée avec le très sensuelle Kim Novak qui inonde l'écran de sa sexualité animale. Walter Matthau dans un rôle très court et ingrat se chargera de rappeler à l'architecte adultère que chaque chose à un prix et que de ce fait la meilleure solution est encore de rester dans la ligne toute tracée de la famille triomphante. Un film bien de son époque qui manque de quelque chose pour être une vraie réussite. A noter le portrait tout en finesse et dérision du romancier joué par un Ernie Kovacs très relax qui semble dire que la décontraction des mœurs est réservée aux artistes. On sait que les années soixante balaieront toutes ses frontières fictives.
Si l'affiche était belle, le résultat final est lui quelque peu décevant. Certes, certaines scènes s'avèrent vraiment intenses et assez émouvantes. De plus, certains plans sont d'une grande beauté et savent capter toute notre attention. Certes, la relation entre Kirk Douglas et Ernie Kovacs est convaincante. Pourtant, il faut reconnaitre que le sentiment qui prédomine est tout de même l'ennui. Que ce soit le rapport Douglas-Novak, ou celui des différents personnages en général, l'ensemble parait presque plat, les dialogues se révélant même assez peu percutants sans être néanmoins hors sujet. Quine ne semble pas s'être assez intéressé au schéma de la ville et de la rumeur, à l'exception du personnage de Walter Matthau, qui s'avère d'ailleurs (le personnage) assez peu crédible. On pense d'ailleurs à Douglas Sirk, mais sans flamme, sans passion, sans génie, les couleurs n'ayany d'ailleurs rien de renversante. Reste une fin magnifique et presque bouleversante, pleine de retenue et d'émotion, bref : tout ce que le film n'avait jusque là pas vraiment réussi à nous offrir. Ces quelques minutes nous permettent alors de devenir moins amère quant au résultat final, mais il nous reste tout de même ce gout d'inachevé dans la bouche, d'autant plus qu'on a la ferme impression qu'on est peut-être passé à côté de quelque chose de très fort.