Un problème de nombreuses suites est le fait de remaker l’épisode original (58 minutes pour vivre en est l’exemple type). On ne pourra au moins pas faire ce reproche à James Cameron et Aliens, le retour. Le "s" rajouté au titre du film de Ridley Scott n’est pas qu’un simple ajout publicitaire mais bel et bien l’essence même du projet. En effet, sachant qu’il serait vain d’essayer de recréer l’angoisse du premier film (qui jouait beaucoup sur le fait de montrer le moins possible le monstre, aspect qui ne peut plus réellement marcher dans une séquelle), il décide de multiplier le nombre de créatures et de transformer le film d’épouvante en véritable film de guerre. Le réalisateur sort de l’écriture de Rambo II : La Mission (qui se verra en grande partie réécrit par Sylvester Stallone) et cela se ressent : on y retrouve des thématiques communes
(Ripley doit retourner dans l’enfer de LV-426, comme Rambo au Vietnam, afin d’exorciser son traumatisme)
et le même enchaînement de séquences guerrières.
Mais Cameron ne se contente pas de transformer son œuvre en film bourrin. Effectivement, il a l’intelligence de développer la personnalité de Ripley, qui devient vraiment cette fois le personnage principal, en insérant le thème de la maternité (surtout dans l’édition spéciale de 1991 où l’on découvre qu’elle a une fille et que celle-ci est morte pendant sa période d’hyper-sommeil, ce qui justifie tout à fait celui-ci au passage et en fait la version à privilégier) et en la transformant en femme forte, annonçant l’évolution de Sarah Connor entre les deux premiers Terminator. De plus, il se permet d’étoffer le mythe de l’Alien en lui offrant un nom (Xenomorphe) et en inventant totalement le cycle de reproduction de cette race en faisant intervenir la Reine Alien (ce qui déplaira fortement à Ridley Scott) et de développer le rôle de la Weyland-Yutani, qui n’est plus juste appelée la Compagnie). Cela rend cet opus comme étant incontournable dans cette saga (que ce soit pour les films ou pour l’univers étendu).
En plus du scénario (sous influence d’Étoiles, garde-à-vous ! de Robert Heinlein qui permet à Aliens d’être vu comme un ancêtre du Starship troopers de Paul Verhoeven), Cameron se voit offrir la réalisation grâce au succès du premier Terminator. Sachant cela, il est donc assez inutile d’expliquer que la mise en scène d’Aliens, le retour est assez irréprochable que ce soit dans les scènes dramatiques ou dans les scènes d’action et que la maîtrise des effets spéciaux est totale.
Le perfectionnisme de Cameron posera d’ailleurs de gros problèmes au compositeur James Horner qui est obligé d’écrire sa bande originale dans la précipitation. Cette conception dans l’urgence ne se ressent toutefois pas et Horner se permet même d’offrir un morceau emblématique du cinéma d’action avec le titre Bishop’s Countdown qui sera réutilisé un nombre incalculable de fois dans des bandes annonces.
À tout cela s’ajoute un casting excellent avec la petite Carrie Henn (dont "Newt" constituera le seul rôle, privilégiant l’enseignement), Michael Biehn, Lance Henriksen, Bill Paxton (tous trois étant également présent au générique du premier Terminator), Jenette Goldstein (géniale en guerrière encore plus dure à cuire que ses collègues masculins) et surtout une Sigourney Weaver qui transforme définitivement Ripley en icône féminine ultime du cinéma d’action (elle sera d’ailleurs nommée à l’Oscar de la meilleure actrice, chose assez inédite pour un film de ce genre).
Avec Aliens, le retour, James Cameron, en plus d’offrir un sommet du film d’action, ancre définitivement la saga Alien dans l’espace culturel du cinéma fantastique et permet à celle-ci de posséder l’originalité d’offrir une vision totalement différente du mythe à chaque volet selon la personnalité du réalisateur (du moins pour la quadrilogie de base). Chacun pourra donc choisir quel volet, il préfère (celui-ci rentrant généralement en concurrence avec le premier).