"Faire quelque Chose". Le titre n'est peut-être pas très bien choisi. Après tout, les résistants n'ont pas été les seuls à vouloir faire quelque chose. Les collaborateurs avides du début de la guerre et les épurateurs zélés de la fin de la guerre ont eux aussi décidé de faire quelque chose. Autre chose. Dommage qu'il ne soit quasiment plus possible (parce que les faits remontent à 70 ans, parce que ce ne sont pas des choses dont on a envie de parler...) de recueillir leur parole à eux, tout aussi précieuse à un autre niveau. De prime abord, ce documentaire apparaît comme beaucoup trop scolaire. Au niveau de la réalisation, ce n'est pas vraiment "Le Chagrin et la Pitié", on a plus l'impression de se retrouver devant un de ces vieux documentaires du CNDP qu'on nous passait de force en classe. Alors on écoute ces nonagénaires à rosette comme on écouterait nos grands-parents raconter leurs souvenirs de jeunesse : avec respect mais sans grande attention. Et puis, plus ça va, plus les thèmes abordés se font intéressants (la poésie de la Résistance, les assassinats et les exécutions, les arrestations et la torture, le ressentiment vis-à-vis de l'ennemi...), plus les témoignages se révèlent forts et poignants. Il faut dire qu'un ancien combattant qui témoigne, ça fait vieux sage vénérable alors qu'un ancien combattant qui défile (et on en voit quelques uns dans le film), ça fait vieille ganache ringarde. Le "casting" du film est très bien fait, mélangeant allègrement témoins "institutionnels" stars des médias (Aubrac, Hessel...) livrant des réflexions d'ordre général et témoins plus anonymes partageant des sentiments et des souvenirs plus personnels. Bien vu aussi de ramener cette discussion sur l'engagement à l'actualité en faisant glisser le sujet vers le programme du CNR, véritable socle du modèle social français, mis à mal depuis quelques années, depuis que l'économie a pris le pas sur la politique. Cela donne une modernité et un sentiment d'urgence au propos. Et ce sentiment d'urgence est renforcé quand on voit le nombre d'intervenants qui ont passé l'arme à gauche depuis l'époque du tournage. Dans quelques années, réaliser un tel doc ne sera plus possible, faute de témoins directs. Mais bon, comme l'écrivait Aragon, "La mort n'éblouit pas les yeux des partisans".