Qu'est ce qui empêche donc "L'enquête" de se hisser au niveau de certains films exemplaires du genre à savoir "Le prince de New York" de Sidney Lumet ou encore avec le "Révélations" de Michael Mann (ce titre étant d'ailleurs celui du 1er livre consacré par Denis Robert à cette affaire) ? Je dirais tout simplement que c'est un problème de mise en scène. Jamais Vincent Garenq n'arrive à sortir des ornières de sa démonstration de manière visuelle, jamais il n'arrive à nous ressentir le vertige, l'abîme au bord duquel se trouve son héros. Au niveau de la mise en scène, on reste devant un découpage classique, duquel survient parfois quelques bonnes idées visuelles, mais qui n'embrasse jamais complètement le rythme trépidant d'un pur thriller ou bien d'un drame parano. C'est une illustration sage d'un fait divers avec un défilé de sosies des personnages réels qui ont été mêlés de près ou de loin à cette affaire. C'était peut-être son intention de base, de coller à son sujet de manière aussi impersonnelle, mais on ne peut que regretter ce manque d'ambition visuelle symptomatique de notre cinéma hexagonal. Un manque d'ambition symbolisé par l'illustration de certains milieux, qui confinent aux lieux communs les plus éculés (la représentation des espions notamment). Le sujet, propice à toute une remise en question de notre système, reste toutefois bien traité au niveau du scénario, et on a bien tous les tenants et aboutissants de cette histoire. Au milieu de ce véritable chaos, on croise de nombreux noms très connus, certains recoins de l'affaire apparaissent comme particulièrement sordides et on arrive parfois à ressentir le côté dangereux de cette enquête. Suicides mystérieux, secrets défense, magouilles, emballement de la machine judiciaire, intimidations, rien ne manque au tableau de ce bon film qui reste bien monté et bien rythmé, racontant sans trop d'accrocs son histoire. Et puis il convient de souligner la bonne interprétation du casting. Même Gilles Lellouche ? Oui, et je dirai même surtout Gilles Lellouche. Le rôle qu'il défend est assez double puisque si le journaliste est présenté sous un jour avantageux au travail, son côté mari et papa est par contre beaucoup plus contrasté. Si l'on logiquement comprendre que le bonhomme perde pied avec la réalité, les différentes scènes montrant sa vie de famille le montrent sous un jour peu flatteur. Dans certaines scènes, Gilles Lellouche est tout simplement magistral, abandonnant certains de ses tics de jeu et l'on peut mettre ceci au crédit de Garenq, qui se révèle un directeur d'acteurs intéressant et particulièrement efficace. Le reste du casting, composé essentiellement d'acteurs peu connus, sauf Charles Berling (excellent par ailleurs mais c'est tellement une habitude avec lui), mais chaque rôle est bien campé. En définitive, un bon film toutefois, qui souffre bien sûr de son manque d'ambition visuelle et qui ne parvient pas à faire exister tous ses personnages, mais qui propose un film intéressant, au propos souvent passionnant, nous tenant en haleine de bout en bout grâce à son scénario bien ficelé. La critique complète ici