Après un fantastique reboot et une suite de bonne facture, la saga "Star Trek" s’offre un troisième épisode… qui partait avec quelques épines dans le pied. Plus que le départ du siège de metteur en scène de J.J. Abrams (qui se cantonne au poste de producteur), c’est son remplacement par Justin Lin (réalisateur de 4 épisodes de "Fast and Furious") qui m’inquiétait… surtout au vu de la bande-annonce tapageuse et, dans une moindre mesure, de l'affiche bariolée qui laissaient craindre un renoncement à la beauté esthétique et aux enjeux dramatiques forts des deux premiers opus au profit de séquences explosives et creuses. Même la promotion au rang de scénariste de Simon Pegg (à qui on doit l’excellent trilogie "Cornetto") ne me rassurait pas. Au final, "Star Trek : Sans limites" est, certes, le moins film de la nouvelle saga mais est, malgré tout, bien plus réussi que prévu puisqu’il remplit, haut la main, sa mission de divertissement spectaculaire et entretient un véritable lien (notamment formel) avec ses illustres prédécesseurs. Parmi les bons points, on retiendra les séquences d’attaques de l’essaim des "abeilles" (notamment sur l’Enterprise), qui impressionnent par leur gigantisme et leur force de destruction. Autre séquence épatante : la contre-attaque de Kirk et son équipage dans l’USS Franklin au son du bien nommé "Sabotage" des Beastie boys, qui aurait dû être symptomatique du traitement "Fast and Furious" de Lin… et qui s’avère étonnement rafraîchissante dans l’univers Star Trek. Les effets spéciaux et, plus généralement, les décors proposés sont, également, une vraie réussite (la station spatiale Yorktown et son architecture qui exploite la gravité est assez bluffante). Enfin, on retrouve le ton gentiment décalé qui faisait la force des opus précédent et qui s’accorde toujours aussi bien avec les séquences d’action qui, et c’est une bonne chose, se montrent un peu plus légères dans l’emphase dramatique que "Into the darkness" (qui sortait un peu trop les violons par moments). Cette légèreté s’avère, malheureusement, être également une des faiblesses de ce troisième opus qui peine à se démarquer en raison d’une intrigue un peu trop creuse ou, plutôt, trop classique. On a, en effet, l’impression d’assister à une simple mission de l’USS Enterprise, privée de la fraicheur du reboot et des enjeux dramatiques de sa suite. Il manque à "Star Trek : Sans limites" soit un sujet plus fort, soit un suspense moins factice. Car, au vu de la structure de l’intrigue (très chargée en grosses ficelles), il faut vraiment être très distrait pour ne pas comprendre où les scénaristes veulent nous emmener (l’évocation du nouveau vaisseau en construction qui annonce la destruction de l’USS Enterprise, le projet de Kirk de lâcher le commandement de l’Enterprise et celui de Spock de retourner sur Vulcain qui annoncent une inévitable prise de conscience finale, l’évocation, par Jaylah, du nom du tueur de son père qui annonce l’inévitable confrontation avec ce dernier). L’exemple le plus frappant reste le rôle du grand méchant Krall (Idris Elba, trop caché par le maquillage pour exprimer vraiment quelques chose), qui se veut très mystérieux alors que le scénario n’a de cesse de balancer des indices na laissant pas le moindre doute quant à son identité réelle (sa connaissance de Starfleet, la découverte providentielle du vaisseau perdu USS Franklin ou encore l’évocation de son nom comme héros disparu sont autant d’éléments qui rendent la scène de la "révélation" assez dispensable). Autre problème (plus anecdotique), Justin Lin peine à rendre le sentiment de gigantisme provoqué par les attaques dans l’espace lorsqu’il film le repaire des méchants qui semble bien vide. Enfin, si on ne peut qu’être ravi de retrouver l’équipage de l’Enterprise au complet, j’ai trouvé que Zoe Saldana (Uhura) n’avait pas grand-chose à défendre ici et, surtout, que Karl Urban cabotinait à mort en Dr McCoy, transformé en beauf de service. Pour le reste, John Cho (Sulu) et le regretté Anton Yelchin (Chekov) a été un peu moins oublié par le monteur (mais restent les deux personnages mineurs de l’équipage), Simon Pegg (Scotty) se contente de son rôle de comique de service et, à tout seigneur, tout honneur, Chris Pine fait murir le capitaine Kirk (moins tête brûlée sans pour autant être moins fun) et Zachary Quinto est toujours aussi savoureux en Spock aux réactions décalées. Quant à la petite nouvelle Jaylah (campée par la décidément très intéressante Sofia Boutella), elle apporte une touche d’humour inattendue au vu de sa mise en avant plus "guerrière" lors de la promotion du film. "Star Trek : Sans limites" est donc un très honnête divertissement mais aurait gagné à être plus original… ce qui lui aurait permis, sans doute, de réaliser un meilleur score au box-office.