David Cronenberg a toujours aimé les monstres. Il en offre ici une belle galerie, pur produit d'un Hollywood décadent et abject. Le tableau très acide et très noir qu'il brosse de l'usine à rêves conjugue réalisme satirique et délire fantasmatique, mais sans trouver malheureusement un équilibre convaincant. Le scénario initial, signé Bruce Wagner, était de son propre aveu une catharsis. Cronenberg ne l'a manifestement pas assez retouché pour réduire l'aspect "défouloir sans retenue". Ce dézingage systématique de tout ce qui bouge à Hollywood est amusant un moment, mais lasse vite. Artillerie lourde. Feu nourri de dialogues trop écrits, trop ostentatoires en matière de sarcasme et de cynisme. Le film a beau être bien réalisé, bien interprété (avec notamment une Julianne Moore hallucinante dans un rôle borderline), il donne l'impression d'être un catalogue de tares, une énumération - fastidieuse - de toutes les dérives possibles et imaginables du star-system : avidité indécente, égotisme, hypocrisie, vulgarité, immoralité, cruauté... Tout cela sur fond d'hypernévrose généralisée. Mêlant sexe, drogue, violence. Tous les clichés y passent. Et à force d'outrances, plus rien ne paraît vraiment pertinent. Deux thématiques auraient pu sauver la mise : la liberté et l'inceste. La liberté ou plutôt l'absence de liberté pour ces personnages prisonniers de leur vanité, de leur histoire, de leurs rêves, prisonniers d'eux-mêmes. Et l'inceste, métaphore d'une forme de consanguinité régnant à Hollywood, ce petit monde fonctionnant en vase clos. Consanguinité qui porte en elle une autodestruction. Mais là encore, Cronenberg enfonce trop le clou : le poème de Paul Éluard, "Liberté, j'écris ton nom..." est plaqué et répété sans cesse, et le psychodrame familial se dénoue en un mélange pas très heureux de grand-guignolesque et de romantisme noir... On reste sur un sentiment d'overdose et de déception.