Après " Man of Steel", voici un deuxième film que je vois et dont je découvre au moment d'écrire ces lignes que j'avais déjà critiqué un film du réalisateur. Mais autant l'image du dernier Superman m'avait laissé un goût de déjà-vu moche, autant peu d'éléments de ce "Metro Manila" pouvaient me rappeler " Cashback", tant les deux films peuvent paraître dissemblables, entre un film conceptuel et arty inscrit dans la réalité britannique, et ce polar à dimension documentaire tourné à Manille, caméra à l'épaule, par Sean Ellis qui écrivait ses dialogues en anglais, les faisait traduire en tagalog par les acteurs et validait la sincérité des scènes sans comprendre cette langue.
Après l'échec commercial de "The Broken", Sean Ellis a mis quatre ans à monter la production de ce film pourtant à petit budget, moins d'un million de dollars. Il raconte en avoir eu l'idée en 2008 en assistant à une rixe d'une très grande violence en pleine rue entre deux convoyeurs de fonds, et c'est une évidence que la violence sous-tend tout le film : violence sociale d'abord, dans une première partie quasiment documentaire, où nous suivons les péripéties de la gentille famille qui se voit chassée de sa terre, incapable de racheter des graines après avoir vendu sa récolte de riz 2 cents le kilo, alors que l'année d'avant on la lui avait achetée à 10 cents. Arrivés à Manille, ils trouvent un logement minuscule pour 1200 pesos, toute leur fortune, avant de s'en faire expulser le lendemain par la police, le soit disant loueur n'étant qu'un escroc qui avait profité de la vacuité provisoire du logement.
Cette violence de l'exploitation se retrouve à tous les niveaux, que ce soit la tenancière du bar à escort girl qui reproche à Mai son manque d'entrain, et qui voyant sa fille de 9 ans, lui offre une deuxième chance si elle accepte de la mettre elle aussi au "travail", celle du patron de l'agence de transport de fonds qui envoie le coéquiper informer la veuve du décés d'un convoyeur, avec ses effets personnels et quelques billets, ou encore celle des lumpens qui s'escroquent ou se volent le travail entre eux. Il y a une dimension documentaire, non seulement dans le sujet, mais aussi dans la façon de filmer, d'aller saisir des détails comme on place des plans de coupe dans une interview.
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