Capable de s'attaquer avec brio à de nombreux genres différents, John Ford, avec The Long gray line, met en scène plus de cinquante ans de la vie d'un immigrant irlandais, notamment lorsque celui-ci fréquentait l'école militaire de West Point.
À première vue, cet homme ne semblait pas forcément être intéressant pour un biopic mais c'était sans compter l'immense talent de John Ford, capable de faire ressortir les émotions et la richesse de toutes sortes de récit. Il arrive à le rendre intéressant, présentant un homme un peu maladroit, ne sachant guère se battre ou nager mais courageux et très optimiste et on le suit à travers de nombreuses péripéties au sein de cette école et durant trois générations qui verront deux Grandes Guerres. Ford s'intéresse surtout à l'humain et aux émotions, tout en rendant un bel hommage à son Irlande natale et en mettant en avant le temps qui passe, les dilemmes de la vie et la difficulté de celle-ci et de ses épreuves, thématique qui a toujours su me passionner et toucher lorsqu'elle était bien mise en scène.
Il oscille entre plusieurs tons avec de nombreuses touches comiques mais aussi de plus en plus dramatique plus on avance dans le récit et surtout mélancolique, arrivant à en faire ressortir une dimension forte et touchante. Il trouve toujours le bon équilibre, sachant bien mettre en avant l'ambiance mélancolique et légère tout en étudiant son personnage principal et une foule de seconds rôles tout aussi intéressants. Le metteur en scène de Rio Grande capte avec brio le contexte des époques qu'il met en place, que ce soit dans les moeurs, l'ambiance ou les décors, sachant nous y immerger pour nous donner l'impression d'être aux côtés des personnages. L'oeuvre est souvent étonnante, Ford surprend sans tomber dans un quelconque excès, sachant aussi faire passer les émotions par de simples gestes ou regards.
Il signe là son premier film en Cinémascope, procédé qu'il n'aime pas, et pourtant l'effet se ressent aussitôt, bien aidée par un très beau technicolor captant parfaitement, surtout dans la seconde partie, l'atmosphère froide et de temps qui découle. De nombreuses séquences sont mémorables, notamment celle posée où il met en avant le ressenti des personnages. La partition accompagne admirablement le récit tandis qu'il trouve toujours les plans parfaits, mettant bien en valeur les sentiments des protagonistes. Ils sont d'ailleurs tous très bien interprétés, en particulier la belle Maureen O'Hara mais aussi Tyrone Power, tous deux sachant bien allier humour et émotion. À noter aussi l'apparition de Patrick Wayne, fils de John ici absent alors qu'il était dans une période faste de collaboration avec John Ford.
John Ford se montre inspiré avec cette fresque retraçant plus de cinquante ans de vie d'un immigré irlandais, sachant osciller entre plusieurs tons notamment l'humour et la mélancolie tout en faisant ressortir toute l'émotion des portraits qu'il dépeint.