A chaque année sa comédie populaire française qui cartonne. En 2014, ce fût le tour de La famille Bélier, d’Eric Lartigau. Pour on ne sait au juste quelle raison concrète, le film s’impose comme l’ambassadeur de la bonne humeur à la française, message filmique d’espoir, façon rêve américain. D’américain, par ailleurs, la famille Bélier en possède les atouts artificiellement indépendants, caractéristiques de l’école Sundance, là ou d’une nationalité spécifique le film d’Eric Lartigau aurait sans doute tiré son épingle du jeu. Outre cette vision, La famille Bélier possède également tous les ressorts essentiels à la construction d’une comédie populaire traditionnelle hexagonale, avec humour, tendresse et chanson à l’appui. Voilà en quelques mots le cadre spécifique d’une comédie qui assume son procédé mixte, son attirance pour le rêve réalisé, pour la guérison des maux par la garantie d’un avenir satisfaisant tout le monde.
Le film est également l’occasion, les Césars n’y étant pas passés à côté, de révéler les talents multiples d’une certaine jeune fille, Louane Emera, candidate charismatique d’un télé-crochet musical de TF1. La toute jeune chanteuse, idole des plus petits, marque ici de par une prestation toute naturelle, authentique et parfaitement adaptée à son registre. Seul enfant doté d’ouïe d’une famille de sourds et muets, celle-ci devra choisir entre sa participation essentielle à la vie familiale, une famille qu’elle aime, ou un avenir tel que rêver, dans la chanson. Son talent ayant été découvert sur l’estrade de la chorale de l’école, les choses s’enchaîneront aux rythme des grands tubes de Michel Sardou, jusqu’à une conclusion, il faut l’avouer, magique. Oui, c’est sans conteste ce final admirable, on aurait dit que Sardou a écrit ‘’Je Vole’’ bien des années auparavant expressément pour cette séquence, que le film est un succès. N’enlevant rien au reste du long-métrage, ce final en chanson, diablement sentimental, comblera à lui-seul un public nombreux adepte des bons sentiments. C’est certes un peu niais, mais que c’est efficace.
Aux côtés de la jeune révélation, soulignons les présences magiques de François Damiens, une valeur des plus sûres, et de Karin Viard, tous deux formidables en parents sourds et muets. Ayant acquis les bases du langage des signes, chacun des acteurs semble avoir résolument pris soin d’être on ne peut plus authentique. Le père, Damiens, est touchant comme jamais, déclencheur de bien des barres de rires. Quant à la mère, Viard, celle-ci, de par sa joie de vivre, sa petite folie contagieuse, elle égaie les séquences strictement familiales. On ne peut alors que saluer les efforts fournis par le casting pour avoir appris la communication pour le langage des signes, pour être parvenu à un naturel saisissant et touchant alors que l’entreprise semblait vouée à une certaine forme de racolage. On pourrait pour autant regretter le manque de volume des parents face à l’importance dans le scénario de leur fille talentueuse en chansonnette. Oui, la campagne électorale menée par le père ne mènera tout simplement nulle part, effacée par les airs de Michel Sardou et les rêves de la fille.
Attachant, drôle, humain, le nouveau film d’Eric Lartigau se démarque de la concurrence et réussi à prendre le public par les sentiments. Jamais prétentieux, jamais moraliste, le réalisateur parvient à faire d’un petit morceau de pellicule quelque chose d’important pour la comédie française, un film honnête. C’est déjà un très bon début. 14/20