Ce film souffre d’un manque rédhibitoire de point de vue et de ligne narrative, rendant sa vision pénible dans sa totalité. Fatras d’images, fatras de sons, fatras de pistes : le film ne dépasse pas l’impression de chaos. Il irradie souvent de percées poétiques, à commencer par ce très bel incipit tout chorégraphié, hommageant la grâce du skate, comme avait su le faire Gus Van Sant dans l’hypnotique Paranoid Park. Plusieurs thèmes se dessinent rapidement, pour lesquels le spectateur se demande comment le film parviendra à les coudre : la jeunesse dans son hybris comme dans son culte Ken Park, cliché généraliste assez galvaudé ; ses rapports tout aussi universels et asymétriques de fascination-répulsion avec la vieillesse ; au contraire un angle serré sur un groupe sociologique fort, les skateurs de Trocadéro ; une fantaisie irréelle, celle de leur prostitution. C’est toutefois une micro-histoire dans la diégèse qui intéresse le plus, celle de l’amour unilatéral et littéralement mortifère qui relie JP à Math, jalon cohérent et tenu à son terme. La piste sociologique est très vite abandonnée, dès lors que les personnages dialoguent, tant tout sonne faux. Aucun souci de réalisme ne travaille le film aux dialogues trop ou mal écrits, en tout cas mal dits.
Le néant sociologique de vite se tourner vers un jeunisme inconséquent, une fascination mal placée, et pour toute dire, très pénible. La peinture d’une bourgeoisie décadente, très fin-de-siècle est en revanche réussie, comique dans son outrance : du vieil esthète pathétique aux spectateurs d’un défilé privatisé de haute couture qui ressemble surtout à un rituel fétichiste à la Eyes Wide Shut, sans parler de l’acmé du film, soulevé par l’incroyable Dominique Frot. La scène est inouïe, immortalisée dans le regard du spectateur, vouée à la postérité tant le choc visuel, sonore et moral est explosif, inénarrable.