La Traversée retrace le voyage de ces personnes traversant la Méditerranée entre Marseille et Alger. C'est dans le ferry qui relie les deux pays que sont la France et l'Algérie que les gens osent parler et que la cinéaste Elisabeth Leuvrey a décidé de tourner.
Elisabeth Leuvrey est née à Alger en 1968. Elle a été étudiante à l’Institut de Langues Orientales de Paris et prépare une trilogie documentaire sur l'Algérie dont La Traversée est le premier volet.
Afin de recueiller les témoignages de ces personnes sur le huis-clos que constitue le bateau, Elisabeth Leuvrey et son équipe ont éffectué une vingtaine de traversées entre Marseille et Alger.
La traversée Marseille-Alger dure 24 heures et c'est pendant ce laps de temps que le bateau devient une sorte de confessionnal où la réalisatrice a pu filmer les états d'âmes des passagers et leurs histoires... chargées : "Le moment de la traversée est totalement propice au récit. Les langues se délient parce qu’il faut bien passer le temps, mais aussi par nécessité, parce que justement le bateau devient inconsciemment et pour ce temps seulement, ce lieu inespéré d’où l’on peut se raconter - à soi, à l’autre. Nous ne sommes plus en France et pas encore en Algérie. Et vice-versa. Le bateau se transforme alors en un véritable sas pour les esprits dont les états se modifient très visiblement au cours du voyage", précise Elisabeth Leuvrey.
Elisabeth Leuvrey effectuait elle-même de nombreuses traversées entre Marseille et Alger pour son travail de recherche et c'est lors de celles-ci que l'idée du documentaire lui est venue : "Lors de ma première traversée, j’ai rencontré des passagers et avec tous se produisait une chose étrange que je ne parvenais pas encore à qualifier. Ce sentiment s’est répété au retour et j’ai très vite décidé de ne plus me rendre à Alger qu’en bateau. C’est alors que j’ai réalisé qu’à bord, des ponts aux salons, des cabines aux bars, l’entredeux - rives, territoires, patries - disposait ici d’un lieu, d’un espace mental, que chaque passager pouvait le temps du voyage investir, s’approprier. Je me retrouvais confrontée au coeur de ce qui m’apparaissait être un véritable «rite de passage» - que je recherchais, dont j’avais besoin moi aussi et que j’étais venue trouver là en m’embarquant sur ce ferry qui relie Marseille à Alger", confie la cinéaste.