Il aura fallu un passage à Hollywood (« Pirates des Caraïbes : La Fontaine de Jouvence ») et un éclairage grâce à Daniel Auteuil dans « La Fille du puisatier » pour permettre à l'actrice Astrid Bergès-Frisbey de tenir le haut de l'affiche en France. Aujourd'hui, elle tient le rôle titre de « Juliette », premier film de Pierre Godeau, fils du réalisateur Philippe Godeau (« Le Dernier pour la route », « 11.6 »).
Synopsis Allociné : Juliette a 25 ans, l'âge des possibles, l'âge des amants … Issue d'une génération qui pour ne pas pleurer choisit de rire – Juliette va pourtant devoir grandir …
Astrid Bergès-Frisbey ! Nous avions découvert son joli et innocent minois dans la comédie populaire « La Première étoile ». Déjà, son visage angélique éblouissait l'écran. Déjà, nous la sentions capable du meilleur. La fibre d'une grande comédienne. Désormais, elle porte la responsabilité d'un film sur ses épaules.
Son personnage, « Juliette », jeune fille lunatique de 25 ans, se trouve dans une situation de non choix total. Devant l'immensité des possibilités que lui offre sa vie, l'angoisse est vertigineuse. Confrontée à des décisions sérieuses, l'adulescente préfère la voix lâche de l'évitement et du « Carpe Diem ».
Latence & errance, en somme ! Les mots clés du cinéma de Sofia Coppola. Directement inspiré par le travail de la fille du grand metteur en scène Francis Ford Coppola, et plus particulièrement par ses « Virgin Suicides » ou sa « Marie-Antoinette », le réalisateur Pierre Godeau filme « Juliette » comme une pierre brûlante. Une âme vide et tellement incarnée à la fois. Son père est malade, sa sœur souhaite qu'elle avance dans la vie, son amour de toujours, Antoine, ne veut plus jouer. Tétanisée à l'idée de passer à l'étape supérieure, « Juliette » refuse de laisser derrière elle son enfance. Pierre Godeau symbolise cette période d'entre deux (fin des études, début de la vie active) à l'aide de nombreux flashback / flashforward inventifs. L'idée est brillante, le résultat final un peu maladroit. Dommage ! « Juliette » aligne parallèlement quelques scènes sensibles et maîtrisées, parvenant ainsi à définir avec justesse les angoisses de la jeune fille.
Saluons deux trois autres artifices judicieux : tout d'abord la photographie en super 16 mm, décrite par son réalisateur comme intemporelle et surréaliste, qui retranscrit à merveille le Paris que nous aimons, ses lumières, ses soirées, son universalité. Le deuxième atout de charme de « Juliette » est sans conteste son incroyable bande-son, un jukebox absolument prodigieux où s'enchaîne pêle-mêle des sons de « The Do », « Antony and the Johnsons », « Youth Lagoon », « Alexander », « Soko » ... illustrant habilement l'errance de son héroïne.
Bilan : Réalisateur de plusieurs courts métrages et de clips (« Big Jet Plane » d'Angus & Julia Stone, c'était lui), superviseur musical pour son père, Pierre Godeau brûle les étapes et s'improvise aujourd'hui metteur en scène avec « Juliette ». « Juliette » est un film fragile, poseur, souvent maladroit, mais toujours sincère.