Fruit d'une collaboration franco-danoise, Tout en haut du monde relate la quête de toute une vie pour la jeune aristocrate russe Sacha : retrouver son grand-père, disparu au cours d'une expédition à la découverte du pôle Nord à la fin du XIXème siècle.
La genèse de ce film d'animation aux élans poétiques prend vie grâce à l'idée originale d'une scénariste française, Claire Paoletti, qui fait la rencontre de Rémi Chayé, le réalisateur, et lui expose son projet, bien avant sa sortie dans les salles en 2016. Convaincu et inspiré du récit de l'explorateur britannique Ernest Shackleton, Rémi Chayé influence l'écriture du scénario en puisant dans les événements historiques relatifs à l'expédition Endurance, au début du XXème siècle. Après plusieurs réécritures, dont la plus importante est apportée par Fabrice de Costil, le résultat définitif est présenté à des dizaines de studios de production, jusqu'à ce que France 3 Cinéma et Canal+ soient les premiers à signaler leur accord, rejoints plus tard par une société danoise. Localisée en France car majoritairement produite par elle, la concrétisation du projet connaît des débuts légèrement compliqués, avec un budget réduit à six millions d'euros, ce qui conduit à des économies sur la création graphique.
Au final, le style des dessins de Tout en haut du monde offre un rendu très épuré, en aplats de couleurs, débarrassé de nombreux détails qui auraient nécessité des moyens supplémentaires risquant de faire dépasser le budget. L'avantage de cet effet d'animation est son côté poétique et sa capacité à aller à l'essentiel dans la représentation des émotions. Mais l'économie d'images délivre un résultat peu fluide et plus saccadé. Pour les dessins, Rémi Chayé s'inspire beaucoup des tableaux russes du XIXème siècle, mais également des affiches des compagnies ferroviaires américaines des années 1940 aux couleurs chargées et abondantes.
Au niveau sonore, l'environnement marin est très bien représenté grâce à des captures de son soigneusement réalisées à Brest. En revanche, malgré quelques morceaux chargés d'une émotion mélancolique et fidèle à l'atmosphère du film, la bande-originale atteint un niveau moyen, notamment saboté par une composition pop/rock n'ayant rien en commun avec le cadre historique et visuel de Saint-Pétersbourg en 1882.
En dépit de critiques élogieuses, la réception du film dans les salles est assez décevante, avec à peine 200 000 entrées françaises. Plusieurs raisons à cet échec ont été évoquées : la forte concurrence, composée de six autres films d'animation français durant l'exploitation de Tout en haut du monde ; la faible durée de sa présence dans les salles ; et enfin, l'inégalité de budget des campagnes publicitaires entre films américains et français. Toutefois, la récompense du prix du public lors du Festival d'Annecy en 2015 permet de sauver le film d'un naufrage dans l'oubli et dans les eaux glaciales des critiques les plus acerbes.