Un western qui fait la part belle aux grands espaces et vastes ciels de l'Ouest états-unien (superbe photo de Rodrigo Prieto). Un récit qui chemine façon road-movie, lentement mais sûrement. Deux thèmes - grâce et rédemption - qui sont symboliquement les moteurs dramatiques du film (littéralement aussi, puisque ce sont les prénoms des deux mules qui tirent la carriole transportant les personnages principaux...). Voilà pour la dimension classique. Le reste est plutôt atypique. À commencer par le tandem qui est au centre du film : une vieille fille à forte tête, frustrée dans sa générosité, frustrée d'amour, et un vieux cow-boy pragmatique, pas vraiment du genre humaniste, mais un peu justicier quand même. Tandem inédit et beaux numéros d'acteurs, avec une mention spéciale à Hilary Swank, magnifique et touchante. Ces deux-là nous embarquent dans une histoire sans gunfight, sans chevauchée fantastique, mais avec un tableau social singulier, qui évoque non seulement la dureté de la vie dans le Far West du XIXe siècle, l'envers du rêve américain, mais aussi et surtout la rudesse de la condition féminine dans ce contexte, la pression sociale et morale autour du mariage et de l'enfantement, qui poussent certaines femmes à la folie ou autres extrémités. Thématique rare dans un cinéma de genre à dominante bien virile. Et ponctuée ici, aux trois quarts du film, par un événement aussi inattendu que déchirant. Au final, grâce et rédemption s'effacent au profit d'une forme de nihilisme qui balaie tout, les serments, la dignité, la mémoire, le pouvoir de l'argent... Tommy Lee Jones offre une vision bien désabusée de la conquête de l'Ouest. The Homesman est un film amer à souhait. Il lui manque peut-être quelque chose de plus âpre et chaotique, dans sa forme, pour coller davantage au sujet. Quelques variations de rythme, aussi, pour s'emballer et nous emballer complètement. Mais la qualité est là, bien tenue d'un bout à l'autre.