Un huis-clos dans lequel s’incruste du fantastique, à la fois absurde et dérangeant … Oui, Polanski revient à ses sources, et quel plaisir! Deux personnages, un lieu et une soirée : il n’en faut pas plus au cinéaste pour réaliser une nouvelle oeuvre majeure de sa filmographie!
Cette histoire est tout à la fois légère et profonde, drôle et tragique, vraisemblable et fantastique, plaisante et dérangeante..
J’ai surtout adoré la mise en abyme maitrisée magistralement : la relation entre le metteur en scène et l’actrice, dans un premier niveau, et la relation entre les personnages de la pièce, au second niveau, se complètent et se mélangent avec brio. On ne sait plus ce qui appartient à l’un ou à l’autre, on ne sait jamais complètement jusqu’où les personnages jouent un rôle, et quel rôle ils jouent.. Cette relation ambigue entre les deux personnages est véritablement passionnante. Les deux interprètes sont excellents, dans des rôles pas évidents : Amalric joue très bien le metteur en scène qui ne sait pas trop faire l’acteur, et Emmanuelle Seigner joue avec les différents registres d’une facilité déconcertante (Vanda l’actrice, Vanda le personnage de la pièce).
Polanski propose une mise en scène intelligente, évitant le piège du théâtre filmé, en utilisant intelligemment les ressources dont il dispose : variation scène-public-coulisse, variations dans les angles de cadrage, variation avec les lumières, utilisation originale du son, … chaque mouvement est pensé et fait sens.
Cette Vénus nous parle donc surtout des relations humaines, à divers niveaux : les relations hommes-femmes, les relations metteur en scène-actrice, les relations dominant-dominé, et les relations amoureuses, surtout. Polanski nous offre une vision ambivalente de l’amour, en jouant à la fois sur l’image de Vénus (le versant “divin” de la femme, de l’amour) et celle de la fourrure (le versant “animal”, impulsif, sensuel). Le film juxtapose tous ses niveaux de lecture, ils se complètent les uns les autres, et les questions restent ouvertes. Je suis seulement un peu circonspect concernant le final, certes original et surprenant, mais peut être trop en rupture par rapport au reste du récit. Une autre vision apportera peut être plus d’éclairages sur ce point, le seul reproche que je ferais à ce superbe film jusqu’ici.
Un superbe film qui cristallise les relations humaines et amoureuses avec simplement deux personnages, et jouant les équilibristes entre idéal et réalité. Avec au final, également, une superbe éloge du théâtre, ou de l’art en général, qui devient ici le médium ultime pour comprendre les relations humaines. Sublime!