Avant l'hiver, logiquement c'est l'automne. Or, ce film ou, tout du moins, les relations entre ce couple marié de longue date, est glacial comme l'hiver justement. L'usure. Le temps qui passe. Ce n'est pas vraiment un plaidoyer en faveur du mariage. Moi qui me suis toujours figuré qu'au contraire, l'amour se bonifiait avec le temps comme un bon vin, je revois mes positions. Je croyais qu'on s'aimait toujours. De manière moins démonstrative peut-être mais plus intensément. Bref, toutes ces frustrations sortent petit à petit et c'est là que le rôle de Leïla Bekhti est impressionnant. Elle est à la fois l'épouse jeune, douce, insouciante, aimante, que Kristin Scott Thomas n'est plus. Et à la fois l'enfant que Paul (Daniel Auteuil) n'a jamais eu. En réalité, il a bien un fils mais avec qui il ne partage rien. Ces non-dits, ces secrets de famille remontant à la surface, ce sentiment de ce chirurgien d'être passé à côté de sa vie et de ses plaisirs, ne donnent pas forcément goût à la vie. C'est même assez pessimiste même si on pourrait penser qu'après l'hiver vient le printemps. Le réalisateur n'en a cure. Son film se termine par un twist là encore faisant froid dans le dos. C'est dans la continuité de ce qu'il s'est passé durant une heure trente. Il y a moins de légèreté que dans son film précédent, Tous les soleils, mais il arrive à brosser une galerie de personnages tous très intéressants avec leurs fêlures, leurs maux, leurs désirs. Comme Philippe Claudel est écrivain à la base, c'est peut-être normal qu'il arrive à donner une vraie importance à ses personnages, principaux comme secondaires (comme cette patiente lui racontant l'histoire de cette famille). Un pur film d'auteur, pas du tout commercial et qu'on ne verra jamais sur TF1 sauf cataclysme, conçu comme un thriller donc évitant au spectateur de sombrer dans l'ennui. Si ça pouvait toujours être comme ça.