En deux films coups de poing ("Pour Elle" et "A bout portant"), Fred Cavayé est devenu l’un des réalisateurs français les plus intéressants du moment. J’étais donc impatient de découvrir son troisième long-métrage, dont la bande-annonce promettait le ton sombre, les personnages cassés, et les scènes d’action musclées qui avaient fait sa renommée. Malheureusement, s’il reprend bien tous les thèmes chers au réalisateur (les liens familiaux exacerbés, la peur de perdre un être cher, le dépassement de soi…), "Mea Culpa" souffre d’un grave défaut : son scénario. En effet, c’est peu dire que l’intrigue n’est absolument pas à la hauteur puisqu’il ne réserve pas la moindre surprise au spectateur. Le personnage de Franck (joué par Gilles Lellouche) est, d’ailleurs symptomatique de ce problème puisqu’il cumule les amorces scénaristiques assez grossières. Les scénaristes en ont ainsi fait un ami invraisemblablement dévoué et un père veuf qui élève seul sa fille. Comment ne pas comprendre, dès lors, qu’il est le responsable de l’accident mortel à l’origine de la déchéance de Simon (Vincent Lindon) et qu’il a refusé de l’avouer pour ne pas abandonner sa fille ? Dès lors, son sort est particulièrement facile à deviner… surtout au vu de ces derniers actes qui le prive de tout avenir dans la police et de l’éloignement opportun de sa fille ! Ainsi, la relation entre les deux héros, qui devait être l’un des moteurs du film, en devient rapidement le boulet. Pourtant, la force des deux premiers films de Cavayé étaient d’avoir trouvé l’équilibre entre l’action et l’émotion, en surprenant le spectateur par l’angle choisi (le mari qui va entrer dans la clandestinité pour sauver son épouse dans "Pour Elle", le futur père qui subit les événements plus qu’il n’agit dans "A bout portant"). Dans "Mea Culpa", il n’y a pas la moindre innovation dans cette histoire d’ancien flic voulant abattre les méchants qui poursuivent son fils. Quant à l’émotion, elle ne ressort ni de la relation entre les deux anciens partenaires (trop prévisible) ni des relations entre Simon et sa famille (trop basique). Ainsi, "Mea Culpa" peut se résumer à une succession d’affrontements entre les gentils et les méchants, au cours de scènes bien trop étirées et bien peu originales. Quant aux seconds rôles, difficile de ne pas s’interroger sur la qualité du travail d’écriture tant les personnages sont caricaturaux (Gilles Cohen en chef fraîchement promu et franchement incompétent, Velibor Topic en méchants mutiques qui fait la gueule…) ou transparents (Medi Sadoun en collègue privé de dialogues, Alice Lakadi en ex-femme sans intérêt…). Même le rôle du gamin (Max Baissette de Malglaive), qui aurait dû être central, parait sacrifié, ses interventions se limitant à des cris et autres "Papa ! ". Du coup, les seuls acteurs à pouvoir se mettre quelque chose sous la dent sont Vincent Lindon, impeccable de douleur, et Gilles Lellouche, toujours aussi cool… ce qui ne suffit, malheureusement pas à élever le film au rang qu’il aurait dû tenir. Car je suis dans doute un peu dur avec ce "Mea Culpa" qui se regarde, malgré tout gentiment et rappelle, au détour d’une scène, que Fred Cavayé filme les séquences d’action comme personne en France. Il n’empêche que, au vu de la qualité de ses deux précédents films, Fred Cavayé a prouvé qu’il valait lieux qu’un des yes-man de l’écurie Besson. "Mea Culpa" ne vient pas le confirmer…