À en croire les premières critiques sorties peu de temps avant la sortie de Mourir peut attendre, le dernier James Bond de Daniel Craig serait franchement mauvais et une grande déception. Alors que chez nos voisins britanniques (et maintenant américains), Mourir peut attendre serait une énorme réussite, un franc succès, voire un chef-d’œuvre. Puis, à lire les commentaires de certaines personnes qui n’ont sûrement pas vu le film (puisque pas encore sortie au moment de la parution des commentaires sur des sites français), le nouveau James Bond aurait tout faux : woke, féministe, centré sur l’inclusion, manque de bastons et sentimentale. Comme si ces deux derniers critères étaient synonymes de déroute !
Vu le lendemain de sa sortie, No Time To Die, en VO, n’est ni le chef-d’œuvre que les Britanniques aiment à nommer (pour des raisons évidentes puisque personnage made in chez eux), mais encore moins un échec.
En effet, la première partie est très emballante, presque sans temps mort (un peu quand même). De l’action, des cascades, des courses-poursuites, un peu de sentiments et surtout un humour bien dosé. Ce dernier trait ajoute un sentiment de légèreté tout en gardant un récit sérieux. Quant à la deuxième partie que certains qualifiaient de 'plus sentimentale' ou avec 'moins d’action', et bien je crois que nous n’avons pas vu le même film… On retrouve des courses-poursuites bien que le rythme soit ralenti quelque peu. On enchaîne assez rapidement dans le film, passant d’une péripétie à une autre et avant un break de quelques minutes (certes plus sentimentale en effet, lors des retrouvailles avec Madeleine) et que certains spectateurs ont pourtant trouvé ennuyeux et trop long. Par contre, le dernier Avengers de 3 heures n’avait pas l’air de gêner grand monde…
Les scènes d’action sont plutôt bien réussies. Mention spéciale à la courte séquence de Ana de Armas à Cuba sur laquelle tout le monde semble être d’accord. Et à juste titre. J’ai trouvé la mise en scène de Fukunaga correcte, notamment la première scène post-générique et ses couleurs virant au violet et sombre. Elle était qualifiée de sans saveur par les journalistes, je crois honnêtement qu’on a vu bien pire. En tout cas, la mise en scène n’était pas dégueulasse (pardonnez l’expression.)
Le troisième acte est probablement celui qui posera le plus gros problèmes aux puristes de l’agent 007. Et pour cause. On se retrouve un peu à court de temps. On sent que l’on approche de la fin et que l’étau se resserre. On se dit que le dénouement n’aura pas lieu à quelques minutes de la fin. On assiste à une sorte de buddy movie (j’insiste sur les guillemets) entre Nomi (Lashana Lynch) et Bond. La première, que l’on ne voit pas tellement du film, est un personnage assez quelconque. Heureusement que Phoebe Waller-Bridge souhaitait subvertir et surprendre son public. Hm hm. En effet, on est plutôt surpris par la platitude de son personnage. Et puis, tous ces délires de woke que l’on racontait sont pour moi inexistants.
En lisant les premières critiques (médias et spectateurs n’ayant même pas vu le film et tournant à la corrélation), je me suis dit qu’on aurait sans doute -encore !- le droit à du prêchi prêcha (Waller-Bridge en étant la raison). Pourtant, non. J’ai été assez surprise de la “délicatesse” et du bon dosage de ces sujets finalement peu abordés. Je m’attendais, d’après ce que l’on racontait, à une grande leçon sur le féminisme, l’inclusion ou le machisme qui n’est plus tolérable, sujets typiques en 2021. J’en ai complètement oublié ces critiques stupides car cela était pour moi inexistant dans le film. Une bonne raison pour aller le découvrir et se faire sa propre opinion.
Enfin, bien sûr qu’il ne s’agit pas du meilleur Bond de Daniel Craig, mais de là à enfoncer le film… En regardant les critiques, on s‘attend à assister à une catastrophe. J’y suis allée avec de faibles attentes. Et je crois que c'est ce qu’il faut faire. Dans ce dernier acte, on découvre le grand méchant, qui dans son antre fait référence à de vieux Bond. Rami Malek est plutôt convaincant mais son personnage est tout pourri. Spoiler : faire tout ce bordel pour crever très rapidement, tué par Bond, on se dit qu’il fallait faire ça dès le départ. D’ailleurs, au moment où l’alarme des lieux retentit, Safin s’en fout et dit qu’il a un marché à conclure et donc on suppose qu’il quitte l’île. Mais non, une fois que tout le monde est parti ou mort et qu’il ne reste que Bond, oh surprise, Safin est de retour et meurt ! Pourquoi ? Il y a un petit problème dans le scénario.
Le film se conclut brutalement et provoquera certainement la surprise, l’étonnement (j’en fais partie), le dégoût, la colère et j’en passe. Ce côté romantique à quelque chose de touchant et de triste, mais apparemment cette énorme prise de risque est synonyme de nul ! Il n’empêche qu’on ne peut cacher l’effet que le Bond de Craig aura provoqué chez le spectateur durant 15 ans. On n’aime ou pas la fin (pour ma part c’est un gros non, j’en suis sortie abasourdie et quelque peu déçue), on n’aime ou pas Mourir peut attendre (que j’ai trouvé franchement correcte et réussi), mais on ne peut nier le spectacle proposé qui conclut le cycle bondien de Daniel Craig. On peut saluer/ discuter de l'effort de prise de risque et certains choix. Mais Mourir peut attendre est un spectacle prenant et intéressant qui ne laissera personne indifférent. Merci Daniel.