C'est le film le plus mal accueilli de ce cher Almodovar, et pourtant, c'est le plus léger, le plus impertinent, le plus drôle, le plus excentrique, mais aussi sans nul doute le plus critique de toute sa filmographie. Il est vrai que la comédie, d'une façon générale, n'est jamais considérée que comme un petit moment de divertissement décérébrant et stupide, contrairement au drame et à la tragédie, exutoire cathartique des émotions les plus profondes de l'être humain. Mais à dire vrai c'est une erreur que de mettre toutes les comédies sur le même plan. En mettant ce film grivois, presque malsain, dans le contexte espagnol d'aujourd'hui - je pense à des références que l'on ne peut comprendre en France, liées aux scandales qui ont affecté le pays (on n'imagine pas cela une seule seconde en France), Almodovar signe une réelle satire de la société hispanique, convalescente, en proie à la crise et en pleine explosion identitaire. La liberté qu'il se permet trouve écho dans la télévision d'aujourd'hui, qui promeut, exhibe sans relâche ce qui a trait au sexe. Mais ici c'est avec une esthétisation poussée à l'extrême que le sexe est mis en scène, interrogé dans tout son ensemble - toutes les orientations sexuelles sont permises. Face à la mort, les langues se délient (dans tous les sens du terme), et affrontent, contrairement aux autres sinistres films du genre, avec joie et liberté, les peurs les plus intimes, les malheurs les plus tragiques, les colères les plus sombres de ces amants passagers. A noter l'excellente performance des acteurs, notamment dans l'hilarante scène "I'm so excited"...