Je n’en avais rien vu ni rien lu de ce « Lost River » avant d’aller le voir. J’avais seulement cru comprendre que Cannes l’avait déchiqueté, bien trop sévèrement selon certaines critiques bienveillants. Cela peut paraître bête, mais je m’étais dit que si Cannes n’avait pas aimé, ce film avait peut-être de quoi me séduire. Après tout, il est si facile de juger inadmissible qu’une belle gueule sache en plus bien filmer. Seulement voilà, il ne m’a pas fallu passer beaucoup de temps face à ce film pour comprendre qu’il allait très rapidement me laisser sur le bas-côté. C’est bien simple, pas un instant je ne suis rentré dedans. Je n’y ai vu qu’un ensemble d’artifices, certes pas trop mal maitrisés, mais des artifices qui ne faisaient jamais corps, qui ne prenaient jamais vraiment vie. Ça fait très « listing des choses que j’aime bien au cinéma » pour le pas dire que ça faisait « parfait abécédaire du film indé ». Je prends un milieu pauvre, une situation sociale qui fait écho avec l’actualité, je filme caméra au poing, je marque beaucoup de temps dans mes dialogues, les dénudant le plus possible au passage, je mets un peu de Lynch là, un peu de Refn là, et je satisfais du simple fait que je sois capable de mimer les grands. Alors certes, cela peut paraître bien rude de dire cela, surtout qu’il est en fin de compte bien difficile d’expliquer pourquoi un film marche ou pas sur soi. Mais disons qu’un plan pourrait néanmoins résumer assez bien mon ressenti. Ce plan, c’est celui sur la veste à paillette du personnage de Bully. Quand je l’ai vu, je me suis dit « tiens ça me rappelle quelque-chose… Ah oui, Drive… » Et le problème, c’est que j’ai quasiment fait tout le film comme ça. N’ai-je pas fait l’effort où est-ce le film qui n’a pas su se constituer un univers ? Peut-être les deux mon capitaine. Mais il n’empêche qu’à bien y réfléchir, quand je prends du recul sur ce que j’ai vu, sur ce que j’ai ressenti, sur ce qu’on m’a raconté, je n’ai pas vu de fil conducteur, je n’ai pas ressenti de personnalité, j’ai juste vu une juxtaposition d’artifices accompli par un bon élève scolaire qui oublié de se livrer. Donc voilà, peut-être suis-je sévère, mais quand l’ennui vous tenaille du début jusqu’à la fin, c’est quand même qu’il y a un problème…