"Sorrentino Roma", bien sûr, en écho au "Fellini Roma" de 1972 - et sur la vision de la capitale italienne, le cadet reprend avec grand talent le flambeau du "maestro" disparu en 1993. Mais encore, une communauté de destin entre "Jep" ("Geppino") Gambardella et le "Marcello" d'une autre oeuvre-maîtresse fellinienne, et film-fleuve également, "La Dolce Vita" (1960) : Gambardella est lui aussi "monté" de sa province pour faire une carrière littéraire à Rome, et n'ayant plus rien écrit depuis un unique roman de jeunesse, s'est retrouvé échotier, même si à succès, habitant un appartement de rêve dont la terrasse donne sur le Colisée et d'une élégance irréprochable due aux meilleurs tailleurs et bottiers, mais englué dans la danse macabre "bling bling" des relations superficielles où se grisent les nantis, ses compagnons de route. Il s'était résigné à n'être qu'un mondain, même si excellent dans cette posture, quand atteignant son 65ème anniversaire, il se surprend à la nostalgie (cultivée au plafond de sa chambre, devenant à loisir la mer de sa jeunesse napolitaine) et au bilan (il a vécu en "Casanova", collectionnant les bonnes fortunes, puisqu'il avait perdu sans remède le seul amour de sa vie au sortir de l'adolescence). Esthète par nature, ce "Swann" italien désabusé (qui croise un soir Fanny Ardant, la duchesse de Guermantes pour Schloendorff - j'y ai vu un clin d'oeil), se souvient avoir été à la recherche de "La Grande Bellezza", ce truchement de la Beauté physique vers la Beauté des Idées, et en fait la rencontre in extremis, incarnée par la "Sainte", décharnée et extatique, Soeur Marie. Film absolument magnifique, d'un raffinement de tous les instants, d'une intelligence de tous les instants, d'une richesse infinie, un bijou de ce grand cinéma qu'est le cinéma transalpin (après la récente "Belle endormie" du vétéran Bellochio). Commentaire "posté" alors que le Palmarès cannois est pour plus tard dans la journée, mais un espoir que ce film soit distingué (comme "Il Divo", en 2008), au moins via le génial Toni Servillo (aussi chez Bellochio, et dans le rôle-titre du "Divo").