D'habitude, j'ai l'habitude d'avoir l'habitude ( o_O ) de ne critiquer que les films que je peux voir lors de leurs sorties au cinéma (en me laissant une marge de 3 semaines), ça me permet de faire des critiques sur des films d' « actualités » et de ne pas crouler sous les critiques de films, ça fixe ainsi une barrière. Alors pourquoi faire celle du Cinquième Pouvoir, sorti il y a environ un mois et demi ? Et bien pour rétablir une justice (ou me faire l'avocat du diable, au choix) concernant le film de Bill Condon, victime d'un incroyable bashing lors de sa sortie, causant ainsi son énorme flop aux Etats-Unis et en France (et bien d'autres pays encore). Bide expliqué aussi par Julien Assange (le vrai) qui a boycotté le film depuis le début de sa création allant même jusqu'à envoyer une lettre à Benedict Cumberbatch pour le convaincre de ne pas l'incarner, ce boycott s'explique par le côté assez critique vis-à-vis d'un des fondateurs de Wikileaks (Assange, donc), en-effet le long-métrage se base sur deux bouquins dont un écrit par Daniel Domscheit-Berg, lui aussi co-fondateur du site qui devint peu à peu l'ennemi de d'Assange de par leurs différences d'opinions et de manières de faire. Le regard porté sur l'australien aux cheveux blancs n'étant pas très glorieux (sans être pour autant salaud à son encontre), il a nié en bloc tout ce qui se passait dans le film, un ramassis de conneries selon lui. Mytho ou pas ? J'en sais rien, à vrai dire, avant de voir le film, je ne savais que très peu de chose sur cette (désormais) icône de la liberté d'expression, donc j'ai pris ce que me disait le film pour vérité, mais une vérité et non pas LA vérité. The Social Network, par exemple, n'est quasiment qu'un tissu de mensonges, Fincher et ses scénaristes ont brodé une histoire à partir de faits réels et cela n'empêche pas au film d'être un « P*TAIN de chef d'œuvre », alors oui c'est vrai, Le Cinquième Pouvoir n'est pas du tout du même acabit que The Social Network surtout du fait que celui relatant la création de Facebook déviait assez rapidement de son sujet pour aller vers quelque chose de beaucoup plus générationnel, le « tout-sociable », le concept assez contradictoire de faire de Mark Zuckerberg un génie anti-social alors que celui-ci a crée le plus grand réseau social du monde, c'était d'une incroyable intelligence. Ajouté à cela le style propre de Fincher ainsi que des dialogues savoureux et on se retrouvait devant un long-métrage fascinant. D'où la mention « P*TAIN de chef-d'œuvre », mais si Le Cinquième Pouvoir est clairement moins bon, ce n'est pas pour ça qu'il est forcement mauvais, loin de là !
Ce film se laisse regarder très facilement et arrive même à rendre la personnalité de Julien Assange fascinante (un peu à la manière de The Social Network justement), certaines séquences aurait vite pu tourner au ridicule mais grâce à ses excellents acteurs, ce n'est pas le cas, ça fonctionne à merveille grâce au duo d'acteurs, les toujours excellents Daniel Brühl et Benedict Cumberbatch, très juste. Quant à savoir si Cumberbatch est trop dans l'imitation d'Assange et est incapable de mettre sa petite patte personnel, encore une fois, ne connaissant que très peu l'australien aux cheveux blanc, je ne peux pas m'exprimer sur ce point-là, mais après tout, est-ce si grave qu'il soit trop dans l'imitation tant que c'est une bonne imitation et qu'il joue à fond son rôle ? Pas pour moi en tout cas. Chose intéressante d'ailleurs que de voir que le personnage principal de ce film n'est pas Assange mais Domscheit-Berg, le long-métrage étant tiré de son livre « Inside WikiLeaks : My Time with Julian Assange and the World's Most Dangerous Website » (rien que le titre annonce la couleur du propos), on suit donc le regard et la vie de Domscheit-Berg, son investissement dans le site désormais célèbre pour les informations divulguées ainsi que son jugement sur Assange, Brühl a donc le rôle-titre, lui qui doit souvent se contenter de rôles secondaires (si l'on excepte Good Bye, Lenin ! et quelques autres films allemands), avec Rush, cette année aura été plus que bonne.
Et puis quelle classe il peut avoir ici ! Il en impose avec sa barbe et ses lunettes dans ce film. Franchement au niveau de la prestation des acteurs, il n'y a rien de mauvais à en dire et il en va de même pour la réalisation, inventive et bourrée de bonnes idées, si la façon dont s'affiche le nom des villes est un peu cheap la façon dont est allégorisé (ça se dit ça non ?) le réseau informatique est une idée simplement géniale qui faisait la force (et le sujet) de Chatroom d'Hideo Nakata notamment, et puis la fin également, qui aurait-pu prévoir une dernière scène comme celle-ci ? On touche limite au génie avec cette conclusion de pseudo-témoignage de Julian Assange (toujours joué par Cumberbatch) qui nie en bloc ce dont il est accusé et rejette totalement l'idée d'un film sur WikiLeaks, c'est une manière originale de souligner la protestation d'Assange envers ce film ainsi qu'une bien belle façon de briser le mur entre film (fiction) et réalité, Assange s'adressant directement au supposé journaliste qui l'interroge représentant l'opinion public, le spectateur (puisque pas une seule fois on voit le visage du journaliste).
Pas de quoi crier au scandale, donc, Le Cinquième Pouvoir, un peu comme Lone Ranger (lui aussi démonté par la critique américaine) fait partie de ses injustices de 2013, certes cela est moins bon que The Social Network, certes le sujet aurait peut-être mérité de s'orienter vers quelque chose de plus « universel », de plus critique vis-à-vis d'internet et du « tout public » (même si il pose des questions d'éthiques à plusieurs reprises), mais le reste est quasi-irréprochable, trop d'effets de styles pas forcement utiles peut-être, et c'est tout.