Jumanji, pour ceux de ma génération biberonnés au Club Dorothée et encore jeunes dans cette période du début des années 90 où la technique des effets spéciaux a fait un énorme bon en avant, permettant des fractures de la rétine successives devant des Jurassic Park et autres Terminator 2, c'était un peu comme mettre les pieds sur un terrain de jeux que seuls les livres pouvaient jusqu'alors fouler : celui de créer des images fortes et mémorables pour faire de l'imaginaire personnel, un imaginaire collectif.
Pour ces gamins, d'une dizaine d'années à l'époque et dont je faisais partie, ces icônes du divertissement grand spectacle garderont à jamais une saveur particulière. Jumanji, film d'aventures où l'aventure s'invitait dans le quotidien routinier de deux gamins au sein de leur propre maison, hante encore par certaines de ces scènes mon esprit, à la manière d'un T1000 sortant des flammes ou du visage de Sam Neill face à la résurrection des diplodocus.
Avec ce bagage, il est donc très difficile de ne donner qu'une seule note à ce Jumanji 2.0, relance, nouveau format faisant très rapidement table-rase du passé. Après un clin d’œil rapide à son prédécesseur, instant nostalgie, le format jeu de société est tout logiquement mis au goût du jour pour faire la part belle aux jeux-vidéos. Mais le jeu de société n'est pas mort voyons !!!!
Ainsi avec un regard neuf, presque vierge (comme la forêt #batterie), ce nouveau Jumanji est un film d'aventures façon superproduction montée sur des ressorts déjà bien usés. Pas de surprises avec un déroulé à la manière d'un jeu vidéo, un niveau après l'autre. Le rythme est là, tambours battants, et ne nous laisse que très peu de temps morts, secondé par la logorrhée quasi ininterrompue des protagonistes. On ne s'ennuie pas, c'est un fait. Pour autant, on ne va pas crier à la révolution. Entre actions et quelques bonnes scènes à l'humour certes facile mais efficace, la composante divertissement est remplie avec un quatuor à la sympathie et à la légèreté communicative. Le duo Kevin Hart/Dwayne Johnson, déjà éprouvé dans le style buddy moovie avec Central Intelligence fonctionne. Accompagnés de Jack Black et Karen Gillian (Nebula des gardiens de la galaxie) dans cette quête tropicale aux multiples dangers, il ajoute un énorme point positif à un film qui sans eux, aurait bien moins d'intérêt (et de manière complètement subjective, je suis fan de Dwayne Johnson et de ses mimiques lorsqu'il utilise son image avec autodérision).
Sur le fond, rien de bien exceptionnel non plus dans le message qui fait la part belle aux stéréotypes lycéens. Le geek, le sportif, l'instagrammeuse et l'intello, unit pour le meilleur et pour le pire dans la peau de leur parfait antagoniste au sein du jeu, vont finalement apprendre à se découvrir et à s'accepter les uns les autres, crever les abcès et changer leur vision de l'autre. C'est simple, c'est beau, ça passe.
Pour autant, en se plaçant dans la peau du gosse complètement conquit par le Jumanji de Robin Williams, qui lui, se tournait plus vers les gamins auxquels il s'adressait à l'époque, difficile d'être aussi indulgent avec ce reboot qui s'adresse aux plus âgés tout en tentant de rassembler le plus grand nombre de personnes possible. Il manque un esprit de conquête, de nouveauté et d'inventivité dans cette nouvelle mouture qui va même jusqu'à reprendre certains mécanismes de son prédécesseur, ressemblant plus à un copier-coller aux enjeux dramatiques vites oubliés qu'à de véritables clins d’œil.
Lesté de son passé et de la nostalgie sur laquelle il ne surfe pas vraiment, ce retour dans la jungle laisse un goût d'opportunisme financier. Coupez les fils du passé et vous obtenez un film pas mal, assuré de tous les côtés pour atteindre son objectif.