J'ai passé un excellent moment en compagnie des Black panthers, des militants contre la ségrégation raciale et de la contre-culture de l'époque, hélas, bien révolue aujourd'hui. De nos jours, tout est plutôt dans le conformisme et le prêt-à-penser, me semble-t-il, et Angela Davis doit paraître terriblement datée aux jeunes spectateurs actuels : pensez donc, elle était communiste, et est restée révolutionnaire ! C'est principalement à ce titre, mais aussi parce qu'elle était noire et n'entendait pas accepter un destin de sous-citoyenne, femme et ne supportait pas le machisme ambiant (voir la façon dont le procureur va essayer de la faire passer pour quelqu'un d'incapable de maîtriser ses pulsions, puisqu'elle est femme, cqfd), qu'on s'est acharné contre elle, alors qu'aucune preuve n'a jamais pu être établie dans sa participation à une prise d'otages qui a tourné mal, le FBI (avec Edgar Hoover à sa tête et sa phobie des communistes) l'accusant d'avoir fourni les armes utilisées. Au bout de vingt-deux mois de prison, puis de libération sous caution (le malheureux qui a versé la caution fut menacé de mort), elle fut triomphalement acquittée.
Le film jette une lumière noire (c'est le cas de le dire, il suffisait souvent d'être noir pour être arrêté et condamné le plus souvent sans preuves à des peines disproportionnées, mais la prison est une industrie libéralisée au pays de la « libre » entreprise) sur les goulags américains... Ces prisons sont sans doute la soupape de sécurité de l'économie américains, qui permettent d'éviter un chômage équivalent à celui de nos économies en mettant en prison des tas de gens (à peu près 5% de la population active en prison, qui dit mieux ?). Et hop, le tour est joué, ils ne sont plus chômeurs : qu'attendent donc nos dirigeants pour faire de même ?
Le film propose en filigrane une lecture très critique de la société américaine, de sa justice, de l'oppression qui touche principalement certaines catégories. J'observe que Angela s'est battue pour que son comité de soutien s'intitule Free Angela and all political prisoners : en effet, elle était loin d'être la seule, et il y avait à ce moment-là les célèbres frères de Soledad (lire le beau livre de George Jackson).