11.6 c’est le chiffre correspondant aux millions que Toni Musulin a dérobé à l’entreprise pour laquelle il travaillait, en qualité de convoyeur de fonds. Souvenez-vous, c’était en 2009, et donc cette histoire est en partie vraie, et en partie imaginée par Philippe Godeau le réalisateur. On a qualifié ce larcin de « casse du siècle », et cela nous rappelle forcément le casse du siècle de la fin des années 70, orchestré par Albert Spaggiari. Ces hommes sont devenus des icones, parce qu’ils n’ont tué, ni blessé, ni fait de mal à personne. Ils ont seulement baisé une partie du système avec lequel nous vivons tous, et ce genre de « baiseur » implique forcément un certain respect.
La noirceur en moins, ce film m’a fait penser à un Melville sous Xanax. Avant tout c’est une histoire où le sujet principal reste la solitude d’un samouraï de province. Certes, le personnage principal a une amie, Corinne Masiero excellente dans tous les rôles qu’elle incarne, également un bon copain (Bouli Lanners exceptionnel), mais Toni Musulin demeure inexorablement seul.
Je vais me répéter, mais Cluzet reste pour moi le plus grand acteur français (voire du monde) de sa génération. Il porte le film sur ses épaules, il est omniprésent, et s’offre à nous, cette fois, de façon inédite : il reste le personnage attachant que l’on connait, mais cette fois, pas « sympa » comme d’habitude. C’est un taiseux. Il parle avec son corps, avec ses yeux, avec ses postures, ses attitudes. Il en devient même inquiétant. On ne sait pas s’il va exploser, ou s’il va rester dans la retenue. On assiste a l’élaboration de son plan étape par étape, on est en empathie totale, et personnellement j’ai adoré ça !
Seule petite réserve, on a envie à un certain moment d’une accélération, mais Godeau prend le parti de rester sur un mid-tempo…rien de méchant. Je recommande !