Comme tout le monde, j'ai découvert Angélique à la télévision, lors d'une énième rediffusion de la saga avec Michèle Mercier et Robert Hossein. Le premier film m'avait plu (surtout à cause de la fin) les autres un peu moins... Mais ils m'ont donné envie de découvrir les romans d'Anne Golon (que son éditeur avait obligé à publier avec le nom de Serge Golon, son mari pour que ça fasse "plus sérieux" - curieusement, en Allemagne où le roman avait été publié auparavant, il n"y avait pas eu ce problème de "sérieux"...) Et là, ça a été le véritable coup de cœur. Les livres sont magnifiques. Et ma déception concernant leur adaptation cinématographique n'en a été que plus intense. Les films de Borderie conservaient les grandes lignes de romans, mais l'héroïne n'avait plus que sa beauté, toute sa personnalité complexe avait été gommée au profit d'une aguicheuse un peu niaise. Souvenons-nous qu'à l'époque, les producteurs des films de Borderie cherchaient une nouvelle "Caroline chérie" et qu'ils n'ont eu aucun scrupule à dénaturer le personnage d'Angélique pour satisfaire leur misogynie. Malheureusement, le succès des films a surpassé celui des livres, considérés à tort comme des romans à l'eau de rose alors que peu de romans actuels peuvent se targuer d'une telle qualité d'intrigue et d'écriture. La Marquise des anges semblait destinée à demeurer à tout jamais figée sous les traits de Michèle Mercier jusqu'à ce qu'Ariel Zeitoun proclame son envie d'en réaliser un remake. Là encore, le terme de remake est impropre puisqu'il s'agit d'une adaptation d'un roman, mais passons. Il aura fallu une dizaine d'années au réalisateur pour mener à bien son projet et une semaine pour en faire un des plus gros échecs cinématographiques de 2013. Et si on tient compte des longs déboires d'Anne Golon avec ses éditeurs, il doit y avoir une sorte de malédiction autour d'Angélique... Car Ariel Zeitoun s'est trompé, malgré un petit noyau dur de fans du romans qui attendaient une nouvelle version (mais ont buté sur son casting) personne n'attendait sa nouvelle Angélique. Bien que près de 50 ans séparent ces deux adaptations, force est de constater que malgré leur côté kitch, les films de Borderie conservent de nombreux fans (mais comment ceux-là peuvent-ils se prétendent fans des livres ???) Après une campagne promotionnelle inexistante et des critiques assassines, il ne faut pas s'étonner que le film ait été un échec en salle. Pourtant, Nora Arnezeder est une Angélique très belle, avec du caractère, beaucoup plus naturelle que son illustre aînée. Certes, le scénario s'éloigne du roman et pourtant, par bien des aspects ce film en est beaucoup plus proche. L'atmosphère, d'abord, moins papier glacé. Et puis, la noirceur générale de l'intrigue : complot, tentatives d'assassinat, condamnation à mort d'un innocent, obscurantisme, autant d'éléments cruciaux du roman que la précédente adaptation avait complètement dénaturé. Les livres d'Anne Golon ne cessent de dénoncer le fanatisme religieux et l'intolérance, et avec les films de Borderie, les gens n'ont retenu qu'une bluette à l'époque de Louis XIV et se sont étonnés de ne pas retrouver la même mièvrerie chez Ariel Zeitoun. Par contre, sans remettre en doute le talent de Gérard Lanvin, il est trop âgé pour Peyrac, même s'il demeure convaincant. Il aurait suffit de lui teindre les cheveux et de le raser pour qu'il paraisse plus jeune... Bon film, donc, mais au vue du matériau de base, cela aurait pu être encore mieux, même si je doute qu'un film puisse retranscrire un jour toute la richesse des livres. Ou alors une adaptation à la Game of Thrones... En tout cas, bravo à Ariel Zeitoun d'avoir mené à bien son projet et d'avoir tenté de faire savoir au public qu'Angélique ce n'était pas simplement la chute de reins de Michèle Mercier.