Gregg Araki forme avec Larry Clarke, Harmony Korine et Gus Van Sant un quatuor majeur des réalisateurs américains actuels spécialisés dans l’adolescense. Chacun sa patte bien définie, du frontal, de l’expérimental, de l’éthéré, il y en a pour tous les goûts. Je n’avais vu que Mysterious Skin d’Araki, mais on retrouve immédiatement son goût pour les marginaux, les couleurs flashys et la bonne musique (ici c’est un peu la compilation des meilleurs synthés des années 80, avec Depeche Mode, Talk Talk, Tears for Fears, New Order et j’en passe). Pas difficile avec tout ça de se sentir plongé en 1988.
Encore une fois le sujet va être le mal-être adolescent, mais abordé avec un angle assez original qui est celui du thriller. Coïncidence étonnante d’avoir le même mois trois films articulés autour d’une disparition, avec Gone Girl et Horns, et le faisant tous d’une manière radicalement différente. Pas de fantastique, d’examen du couple au scalpel ou de battage médiatique ici, la mère de l’héroïne disparaît, point. On sait dès le début que l’enquête n’a rien donné, et que l’on va plutôt suivre cette fille qui essaie tant bien que mal de se construire après un évènement tragique et surtout resté sans réponse. Il se maintient pourtant de vagues soupçons autour de son père qui donnent une ambiance particulière au film, mais comme dans les deux autres films cités, ils existent surtout parce qu’il est le coupable idéal aux yeux de tous.
Ici aussi les performances d’acteur sont décisives pour emporter l’adhésion à cette histoire somme toute assez simple, et ils ne sont pas en reste. Eva Green bien sûr, on accrochera ou pas du tout à son rôle désormais bien rôdé de femme hautaine et glaciale, à la limite de cabotiner parfois mais semblant se régaler à jouer de cette image. Christopher Meloni est parfait lui aussi dans le rôle du père soumis à sa femme, simple et honnête comme le Ben Affleck de Gone Girl. De même il est toujours plaisant de revoir Thomas Jane dans un bon rôle, lui qui n’est pas forcément gâté ces dernières années.
En tout cas il ne faut pas y aller pour voir un thriller, vous risqueriez d’être déçus, mais c’est un bon moyen de découvrir Araki avec un film très accessible, qui sans être majeur reste une agréable surprise.