Seine-et-Marne : la campagne à moins de 40 kms de Paris, à portée de la capitale par le RER et l'autoroute. Une paisible bourgade, à proximité du Val d'Europe (et de Disneyland). Juliette (Emmanuelle Devos) y habite depuis 8 mois maintenant avec mari (proviseur dans un lycée, qu'il ne veut pas qualifier de "difficile" - Thomas) et jeunes enfants (garçon et fille). Ancien prof elle-même, de lettres, la quadra s'occupe avec des piges dans des revues littéraires et un atelier-français réservé aux filles, dans un LEP, indéniablement "difficile". "La Vie domestique" nous livre un gros 24 h de sa vie de grande banlieusarde. Pas d'intrigue amoureuse hors mariage - ce n'est pas une sorte de DH à la française (mais l'adaptation par la réalisatrice, qui signe aussi les dialogues, d'un roman anglais, "Arlington Park"). Juste la routine, la vie ordinaire, "domestique" (en jouant sur les mots : ce qui se rapporte à la maison en général, mais avec la notion de service aussi). Le film débute avec un dîner, "d'affaires" (chez un fournisseur du lycée dont Thomas est proviseur) et s'achève le lendemain soir tard avec un autre dîner, "amical", avec 2 autres couples habitant le même ensemble résidentiel de villas, invités par Juliette. Outre celle-ci, on découvre Betty (Julie Ferrier), issue d'un milieu très modeste, qui ne cherche pas à (re)travailler, satisfaite de son train de vie actuel (mari architecte-urbaniste, 2 enfants jeunes), Marianne (Natacha Régnier), ancien cadre chez Max Havelaar, enceinte d'un 3ème enfant (2 petites filles, un mari fonctionnaire européen, une grande maison - façon foutoir - et une étudiante au pair). Un peu en marge, et que l'on n'invite pas le soir puisque son mari, photographe, est presque toujours en déplacement, Inès, bobo très permissive avec ses 2 jeunes fils (Héléna Noguerra). Il y a aussi dans cette galerie de femmes, la mère de Juliette (Marie-Christine Barrault), la baby-sitter que l'on se dispute, Laura, et même la silhouette tragique de Cindy, une des élèves de Juliette. Les hommes sont des personnages nettement secondaires - les maris, essentiellement, qui en prennent copieusement pour leur grade, de l'absent au macho pur jus, en passant par un aperçu d'égoïstes ordinaires, prompts aux petites humiliations et grandes infatuations.
Isabelle Czajka, pour son 3ème "long", brosse avec précision, mais sans militantisme pesant, un éclairant panorama de la vie de famille pour la classe moyenne supérieure française. Scènes de vie croquées avec un grand souci du détail, plus parlant que de longs discours (les intérieurs se ressemblent, comme les vies que l'on y mène). En 2013 les choses n'ont guère évolué par rapport à ce que connaissait Nicole, la mère de Juliette, au même âge qu'elle, évoluant dans un milieu comparable..... Un casting impeccable pour ce film "féministe", au bon sens du terme, avec des archétypes parfaitement incarnés - par Emmanuelle Devos, et Julie Ferrier, tout spécialement. Quid de la "morale" ? Plutôt désabusée....