21 août, jour de sortie du dernier film de François Ozon, Jeune & jolie, que j'attendais non sans impatience.
En élégante compagnie, celle d'une Marine pour ne pas la nommer, homonyme de l'héroïne du film, je constatai que la salle n°4 du cinéma UGC Normandie était pleine à craquer, de curieux tels que moi et d'illustres spectateurs tels que Bernard Pivot. Le premier rang et son confort nous souriaient donc, pour je l'espérais, presque deux heures d'évasion.
L'immersion dans cette dernière fut rapide pour avoir été estomaqué par cette presque nouvelle venue dans le paysage cinématographique français, Marine Vacth, jeune, jolie et bluffante.
Le titre du film pourrait laisser croire à Bernard Pivot qu'un vent de fraîcheur va le bercer le temps d'une séance, qu'il va assister à des pans de la vie de cette adorable adolescente découvrant avec une maturité maîtrisée le pouvoir de séduction qu'elle exerce sur ses contemporains du sexe masculin. Même si cette jolie actrice dégage la fraîcheur qu'attendait Bernard, c'est un autre aspect de sa personnalité que François Ozon éclaire de sa caméra d'amateur de bon cinéma et d'esthétiques jeunes femmes.
Isabelle, le nom de l'actrice principale dans le film, passe des vacances heureuses dans le midi, berçées par le chant des cigales mêlé au bruit redondant des vagues varoises. Etant la bombe parisienne de la plage, elle attire forcément les convoitises et un jeune ado allemand, affublé du prénom de Félix, plus passe-partout que Kurt ou Otto, réussit à séduire Isabelle en lui susurrant un bien vu " che beu d'offrir une bédide glace ? ". Isabelle tombe sous le charme teuton de Félix et s'offre à lui, transformant l'été du généreux allemand en l'un des moments historiques de son existence.
De retour à Paris, les cigales s'étaient tues, la Seine grise avait remplacé les vagues bleues du pays varois et la belle Isabelle reprit sa scolarité au ( pas dégueu ) lycée Henri IV. Dans sa grande chambre, le soir, après ses devoirs expédiés, elle tapotait sur son macbook blanc les pages les plus secrètes de sa vie. Aventurière, férue de nouvelles technologies, la petite se lance dans des aventures risquées et tarifées en offrant ses charmes sur la toile à des inconnus souvent mariés et fréquentant pour certains les boutiques Cyrillus. On la suit peu à peu dans ses rendez-vous, d'hôtel en hôtel, timide et sûre d'elle à la fois, prenant dangereusement goût à ce genre de sport, jusqu'à ce qu'un de ses clients, sans doute le plus "bienveillant" ne connaisse le même sort que le président Félix Faure; l'acteur campant ce rôle, Johan Leysen, m'a d'ailleurs touché, dans ce mélange de culpabilité et de perversion. Les folies clandestines d'Isabelle finissent par être révélées et sa famille, résolue, tente de ramener à la raison la lycéenne... Géraldine Pailhas joue avec enthousiasme le rôle d'une mère dépassée par les événements et Frédéric Pierrot, second rôle que j'apprécie chaque fois un peu plus, celui du beau père, maladroit au possible mais désolé de voir sa chère et tendre constater que sa fille n'est pas que jolie. Petite mention aussi pour le petit frère, Victor, scotché à sa playstation et à sa candeur mais aussi solidaire des nouveaux émois que connaît sa soeur.
François Ozon a donc réussi à plonger dans les méandres de l'adolescence et ses désillusions, en évitant avec l'agilité du cabri la vulgarité, pour offrir au spectateur un film sensible et intelligent dont j'ai la souriante prétention de croire que Bernard Pivot l'aura, comme moi, beaucoup aimé.