Enfin un très bon film français! Ouf, ça fait du bien après toutes ces daubes que la critique nous a survendues. Je ne dis pas que le film d'Arnaud Despléchin n'ait aucun défaut; il a les défauts habituels à ce cinéaste: tendance à tirer à la ligne, à utiliser des personnages secondaires qui n'apportent rien (comme dans l'excellent "Un conte de Noël" qu'Arte a eu la bonne idée de nous programmer). Mais, ce qui manque tellement au cinéma français, c'est, premièrement, un scénario solide; deuxièmement, de vrais personnages auxquels on s'attache. Dans Jimmy P.,(Psychothérapie d'un Indien des Plaines), vous avez les deux, pour sûr!
En 1948, Jimmy, Indien Blackfoot, est revenu de la guerre avec un traumatisme crânien et depuis, il a des troubles visuels, des vertiges, d'épouvantables maux de tête. En 1948, j'imagine bien que les migraines d'un Indien alcoolique ne devaient intéresser personne, sauf que, Jimmy est un ancien combattant et l'armée se doit de le remettre sur pieds! On l'examine; on ne lui trouve rien. Le cerveau n'a pas été lésé. Le psychiatre de service suggère à regrets une schizophrénie. D'où l'idée de recourir à l'expertise de Georges Devereux....
Devereux n'est pas médecin. C'est un ethnologue (qui s'est beaucoup intéressé aux Indiens), français d'origine juive roumaine (la raison pour laquelle Amalric parle américain avec un effroyable accent tudesque?) Mais il a dans l'idée de devenir analyste -et Jimmy va être son premier cas. C'est un esprit vif et léger, pour ne pas dire farfelu, mais d'une grande curiosité intellectuelle et d'une grande ouverture d'esprit. J'imagine que le vrai Devereux, celui qui a écrit le livre qui a inspiré Despléchin n'était pas du tout comme ça.... mais le héros a été modelé sur mesure pour l'acteur fétiche du cinéaste, ce Mathieu Amalric qui, en dépit du temps qui passe, a toujours l'air d'être aussi gamin! Face à lui, Benicio del Toro est inouï -sa voix, son élocution, la façon dont il se déplace un peu vouté, la façon dont son visage exprime son désarroi -grandiose!
Entre les deux hommes, le courant passe; Jimmy fait confiance à ce Georges qui connait déjà si bien la nation indienne, l'interroge sur sa tribu, note dans son carnet les mots qu'il apprend.... Et Georges va démèler ce qui se passe dans la tête de Jimmy; le traumatisme et le coma qui a suivi ont juste permis de faire remonter à la surface des choses enfouies, les difficultés qu'il a toujours eues à garder une femme, et surtout cette petite fille qu'il n'a jamais reconnue parce qu'il s'imaginait ne pas en être le père. L'Indien va reprendre sa vie en main, les migraines vont disparaitre; et le juif va commencer une carrière d'analyste, après cette brillante réussite, et trouver enfin sa place sur terre. Belle histoire, presque trop belle pour être vraiment vraie.... mais qui donne lieu à un film excitant, vivifiant, passionnant. A voir absolument!