Bret Easton Ellis : Voici un nom qui pour nombre de lecteurs ne laisse personne dans l'ignorance. Auteur du grandiose American Psycho, son adaptation cinématographique éponyme a notamment permis à Christian Bale de gagner en notoriété, il y a presque 15 ans de cela. L'auteur de renommée mondiale se consacre aujourd'hui à un nouveau projet qu'il supervise puisqu'il n'est autre que le scénariste du film The Canyons. Réalisé par Paul Schrader, ce dernier ovni met en scène James Deen (Acteur porno reconverti) ou encore Lindsay Lohan, et nous plonge au cœur d'une sombre histoire d'amour entre trois protagonistes dont aucun ne sortira indemne.
Sur le papier, l'idée semble être particulièrement attrayante ; d'ailleurs la bande-annonce nous conforte dans l'idée que ce film marquera les esprits, d'une manière ou d'une autre, en ressortant des salles obscures. Toutefois, le rendu final relève plus du calvaire que de la réussite ! Plusieurs raisons à cela : La première vient directement du fait que l'histoire se déroule sur un vide absolu. Et c'est pourtant ce qui fait la marque de fabrique de Bret Easton Ellis (dont les adeptes n'auront aucun mal à reconnaître le style), à savoir créer des personnages atypiques, souvent riches et désabusés, et les introduire dans une routine des plus monotones pour ensuite les faire évoluer de façon brutale. La différence est que, faute de rebondissements permanents, le spectateur tombe lui aussi dans l'ennui … En effet, beaucoup de scènes se ressemblent et l'intrigue est extrêmement longue à se mettre en place. De ce fait, tout se retrouve désordonné à tel point qu'il est difficile, pour le réalisateur comme pour le public, de donner ou de constater le rythme du film : Une situation initiale interminable, une situation finale on-ne-peut plus brève (limite bâclée), et pas grand chose entre les deux pour faire la jonction …
Mary Harron a très bien su faire la différence à ce niveau. Bien que l'action ne soit pas vraiment la même, la réalisatrice est parvenue à faire d'American Psycho un film culte, et au delà de l'action, cela passe surtout par l'incroyable prestation de Christian Bale, qui a su mettre en relief un personnage doté d'une forte personnalité. A l'inverse de cette démonstration de talent, les protagonistes issus de The Canyons sont incapables de susciter de l'intérêt ou de l'empathie. Tous bâtis sur le même modèle, il n'y a aucune véritable plus-value apportée (sans compter le fait que les diverses interprétations ne sont pas toujours de qualité). Dès lors que l'on arrive en fin de course, tous les événements se bousculent et, enfin, le spectateur daigne prêter un minimum d'attention à ce qui se passe sous ses yeux, mais à peine a-t-il le temps de rentrer véritablement dans le film que ce dernier est déjà terminé. La gestion du temps, particulièrement mauvaise, oblige le réalisateur à clôturer son œuvre de la manière la plus simpliste qui soit, sans même se donner la peine de nous ôter l'idée que The Canyons avait bien quelque chose à montrer dès le début ; un peu à la manière d'une série dont on attendrait le deuxième épisode … On ressort donc de la salle avec la désagréable sensation d'avoir visionné un film inachevé.
The Canyons n'est donc rien de plus qu'un essai cinématographique manqué, qui aurait très certainement été plus convaincant s'il avait été transposé en roman que sur grand écran. Entre acteurs dénués d'émotions et intrigue dénuée d'intérêt, le spectateur se meurt d'ennui en attendant que surviennent les péripéties qui, malheureusement, arrivent bien tardivement, obligeant Paul Schrader à clôturer son film de manière désastreuse. Il n'y a donc pas lieu de regretter le fait que le film soit sorti dans si peu de salles. Décevant pour une oeuvre dont nous pouvions attendre beaucoup …