Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point de parasiter ce sérieux inhérent au monde de l’adulte par un second degré constant qui non seulement brise l’immersion horrifique, mais surtout ne se justifie jamais à l’écran. Que de jeunes adolescents fassent des blagues, se bousculent, jouent à s’effrayer, pas de souci. Mais que des adultes aussi ancrés dans leur vie active que nous l’expose, en miroir, l’introduction reprennent brutalement leurs habitudes passées – c’est-à-dire un comportement puéril – n’est guère crédible. Qu’est-ce, par conséquent, qu’un adulte qui a peur ? Un être qui se raccorderait automatiquement à ce qu’il était lorsqu’il vivait encore à Derry ? Plutôt simpliste. Il semble que le divertissement hollywoodien ne puisse considérer l’adulte autrement que comme un gosse qui regrette l’état d’émerveillement dans lequel il se trouvait jadis. Mais les romans de Stephen King, eux, ne nous disent pas cela ; ils puisent dans le monde des grands toute la fragilité capable de les jeter au sol avec brutalité, capable de les briser en petits morceaux, capable de les pousser à se suicider dans leur baignoire.
Ces trois écueils ne doivent néanmoins divulguer les qualités du film, à commencer par ses acteurs dont la ressemblance avec ceux du chapitre précédent s’avère incroyable. Mention spéciale à Jessica Chastain et James McAvoy, tous les deux passionnants à suivre et toujours à fleur de peau dans leur interprétation. Le clown est également très réussi non en raison des prouesses numériques, mais bien grâce au talent de Bill Skarsgård. Andy Muschietti confère au cauchemar une esthétique particulière, à la fois architecturée – la galerie des glaces, par exemple – et crasseuse, visqueuse, rugueuse. Il use à foison des jumpscare, dont certains fonctionnent, et convoque tout un bestiaire de monstres dont nous aurions aimé partager davantage l’intimité ; il y a cette vieille dame qui vit dans l’ancien appartement de Beverly et se métamorphose en géant zombifié. Horrible ! Notons enfin que Benjamin Wallfisch continue dans la même veine que le précédent volet et compose une bande originale où le crépusculaire et le mélancolique se conjuguent avec talent. Pas de quoi bouder cette suite et fin de Ça, donc. Nous regretterons néanmoins qu’un tel potentiel initial n’accouche pas d’une peur plus durable, plus sournoise, plus insidieuse. Car si Ça : Chapitre 2 est la somme des terreurs qui nous habitent, il n’alimentera pas – et quel dommage ! – nos futurs cauchemars.