Nouvelle réalisation très attendue du maître Ridley Scott, Exodus : Gods and Kings n’est malheureusement pas le succès commercial espéré pour les fêtes de fin d’année car connaissant un gros échec sur le sol américain où les critiques sont très mitigées. De plus le film s’accompagne de polémiques venant de communautés religieuses et est victime de boycottage, notamment à cause de son casting d’acteurs blancs qui est fortement dénoncé avant même sa sortie dans les salles de cinéma. Mais malgré ce violent rejet, j’ai trouvé que cet Exodus : Gods and Kings était très bon, très divertissant et agréable à regarder mais n’est clairement pas l’un des plus grands films de son auteur. L’histoire d’un homme qui osa braver la puissance de tout un empire. Moïse, enfant hébreu sauvé des eaux, élevé à la cour du pharaon Sethi 1er et devenu un grand guerrier, est amené à se soulever contre son frère Ramsès devenu pharaon, afin de libérer son peuple réduit en esclavage. Leader insoumis et porté par sa croyance envers Dieu, Moïse guidera près de 600 000 esclaves vers la Mer Rouge dans un grand périple pour fuir l’Egypte et le terrible cycle des dix plaies. A la fois remake des Dix Commandements de Cecil B. DeMille sorti en 1955 et nouvelle version l’histoire de Moïse, Exodus : Gods and Kings était un des films les plus ambitieux et attendus de l’année 2014. Dès l’annonce du projet, ce grand péplum biblique narrant le destin incroyable de Moïse, fils adoptif de Sethi 1er qui libéra le peuple hébreu de l’esclavage en Egypte, ne pouvait que m’intéresser car aimant beaucoup l’Histoire et aussi et surtout ce genre cinématographique qu’est le péplum qui a quasiment disparu de nos jours. Mais si Exodus : Gods and Kings était aussi attendu c’est parce que le réalisateur de cet ambitieux péplum sur le personnage de Moïse n’est autre que Ridley Scott, ce même metteur en scène qui a ressuscité ce genre en 2000 avec la sortie de son inoubliable Gladiator qui fut récompensé de cinq Oscars. Ce récit biblique ne pouvait qu’être destiné à ce grand réalisateur aujourd’hui âgé de 77 ans, qui est par ailleurs un grand habitué du genre des fresques historiques épiques et grandioses comme Gladiator, Kingdom of Heaven ou encore 1492 : Christophe Colomb et Robin des Bois. Ridley Scott, l’homme qui a ressuscité le péplum, un genre qui avait connu son heure de gloire avec des monuments cinématographiques tels que Ben-Hur de William Wyler, Les Dix Commandements de Cecil B. DeMille, Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz ou Spartacus de Stanley Kubrick, était bel et bien destiné à élever ce genre au-delà de sa résurrection avec Exodus : Gods and Kings voire même à « enterrer » ce genre comme disait Joel Edgerton, l’interprète de Ramsès. De plus, sur le papier et dans les pensées de nombreux cinéphiles, ce péplum moderne était destiné à devenir l’un des meilleurs films de son réalisateur. Mais malheureusement il n’en sera pas ainsi car Exodus : Gods and Kings n’est ni une œuvre majeure du genre ni l’une des œuvres phares de son metteur en scènes, juste un film à grand spectacle très divertissant et réussis mais qui manque d’un certain souffle pour être ce si grand péplum à la sauce Ridley Scott que nous attendions tous depuis son annonce. En fait le grand problème qui se pose et qui ne vient pas du film, c’est que cette histoire de Moïse nous la connaissons tous par cœur, sauf ceux qui se désintéresse totalement de la religion ou qui sont encore trop jeune pour avoir entendu parler de cette histoire. Ceux qui auront vu le film de Cecil B. DeMille ou Le Prince d’Egypte ne seront peut-être pas autant emballé que prévu car connaissant déjà l’histoire et, voyez-vous, cela va tuer en partie le suspense et la découverte de l’histoire. Si Exodus : Gods and Kings avait été un film sur une histoire quasiment inconnue du grand public il aurait été une totale réussite mais seulement voilà, cette histoire sur Moïse a traversé le temps, est une des plus connue et constitue aujourd’hui l’un des récits bibliques les plus cinématographiques qu’il soit. Ensuite ce qui peut poser problème c’est le montage car on sent que les producteurs ont bien cisaillé le film pour avoir une durée correcte, quand même 2h31 avec le générique, et attirer un plus large public. Dans la première partie on aperçoit qu’il y a un cruel manque de transitions entre certains passage, ça va même un peu trop vite,
par exemple Moïse arrive chez les bergers et hop en cinq minutes on le retrouve marié et encore cinq minutes plus tard avec un enfant
. J’exagère un peu mais on en est pas loin et ce découpage de scène peut aussi expliquer le manque de développement de certains personnages, je pense à celui de Tuya, la mère de Ramsès, interprétée par Sigourney Weaver qui apparaît à peine cinq minutes dans le film et là on se demande ce qu’elle fait au casting, ensuite Josué joué par un très bon Aaron Paul, l’inoubliable interprète de Jesse Pinkman dans la désormais mythique série Breaking Bad, ou le personnage de Ben Kingsley qui apparaît lui aussi très peu. Mais connaissant Ridley Scott, une version longue d’Exodus : Gods and Kings devrait voir le jour lorsqu’il sortira en DVD, on sait que le réalisateur aime sortir ses films en version longue et sont généralement bien meilleurs que la version cinéma comme Robin des Bois, Kingdom of Heaven ou apparemment Cartel, le film le plus mal aimé de la filmographie de Ridley Scott. Ce problème de montage devrait donc logiquement être vite réglé d’ici cinq mois. Après, autre défaut du film : une certaine lenteur. Je pense qu’Exodus : Gods and Kings possède en effet un moment de creux, un moment où la tension et l’intrigue retombent pour ensuite repartir avec l’arrivée des plaies d’Egypte ou un petit peu avant. Le film démarre sur les chapeaux de roues avec une spectaculaire bataille d’ouverture, comme dans Gladiator, qui nous fait tout de suite entrer dans l’histoire du film et ensuite,
peut-être quand Moïse s’exil et rencontre l’amour
, le film est peut-être moins captivant jusqu’à ce qu’il décide de repartir, à devenir le leader des hébreux et les amener vers leur liberté. En fait ce péplum biblique qui a coûté la bagatelle de 140 millions de dollars manque de souffle et de rythme par moment, il y en a au début et à la fin, un peu au milieu mais le rythme reste globalement inégalement répartie sur l’ensemble du film. Mais hormis ces défauts, et il était évident qu’il y allait en avoir, cette histoire revisitée de Moïse par Ridley Scott reste très intéressante ne serait-ce que sur l’aspect réaliste donné aux phénomènes mystiques comme les plaies d’Egypte. Alors, même si elles s’enchaînent trop rapidement dans un gros bloc d’images de synthèses stupéfiantes et avec un manque d’explications, les plaies d’Egypte sont montrées comme une succession logique de phénomènes naturels mais qui sont d’un côté peut-être inexplicables, le film laissant planer un doute assez intéressant : est-ce Dieu ou pas Dieu qui crée ces étranges phénomènes ? Le passage des plaies d’Egypte est en tout cas très impressionnant visuellement où on retrouve toute la dimension grandiose de la mise en scène de Ridley Scott. Mais ce qui reste l’élément le plus intéressant et qui est sans doute celui qui a fait le plus polémique est celui qui montre le visage de Dieu qui apparaît ici dans l’esprit de Moïse sous la forme
d’un enfant capricieux assez exigeant et impitoyable
. Ridley Scott offre donc une vision assez crédible de ce qu’aurait pu voir le vrai Moïse comme apparition de Dieu. Et ce qui a pu poser problème aux croyants c’est le fait de montrer un Dieu violent, qui incite Moïse à faire la guerre contre les égyptiens, il l’appelle « général » dans le film, et qui n’hésite pas à tuer notamment lors du cycle des plaies d’Egypte. Le film met donc en avant une image de Dieu qui pourrait poser problème à certaines personnes : Dieu est-il violence ou amour ? Mais pour revenir à cet aspect réaliste que j’ai beaucoup apprécié, j’ai bien aimé le fait que Ridley Scott ai abandonné ce côté « miracle » des Dix Commandements car ici la Mer Rouge se retire « naturellement » et d’une manière crédible, et les Tables de la Loi n’apparaissent pas comme par magie mais sont sculptée par Moïse lui-même. Exodus : Gods and Kings est un péplum biblique qui à la fois tente de montrer que tous ces phénomènes sont intervenus soit de manière naturelle ou soit d’une façon plus mystique et donc inexplicable et notons que le film n’apporte pas de réponse à ceci laissant le spectateur se faire sa propre opinion sur ce sujet. Ensuite ce qui contribue à la qualité du film c’est bien évidemment la réalisation de Ridley Scott qui est ici vraiment très impressionnante. De la bataille d’ouverture épique au cycle des dix plaies d’Egypte jusqu’à la traversée épique de la mer Rouge qui est un des moments de cinéma les plus grandioses que j’ai jamais vu dans une salle obscure, Ridley Scott livre une mise en scène intense, spectaculaire et dote son film de plan d’ensemble juste somptueux de l’Egypte où nous apercevons les pyramides, le Nil, la ville de Memphis ou encore les grandes étendues désertiques, ce qui donne une dimension de gigantisme juste démente. Ridley Scott est un réalisateur passé maître dans l’art du grand spectacle total dans le genre des fresques historiques, un peu comme Peter Jackson pour le domaine de l’épique et de l’heroic fantasy, et avec Exodus : Gods and Kings, le réalisateur de Blade Runner et de Gladiator réalisait sans doute l’un de ses plus gros films de sa carrière. Et enfin, pour conclure cette critique sur un aspect positif j’aimerais parler des acteurs. Alors certes ce n’est pas la grande qualité du film mais je trouve que la prestation de Christian Bale doit être tout de même saluée car l’acteur s’est vu remettre un rôle assez difficile à jouer car on pouvait se demander comment allait-il faire oublier Charlton Heston dans le film de Cecil B. DeMille ? Et bien l’interprète de Batman dans la trilogie Dark Knight de Christopher Nolan livre une version très intéressante et crédible du personnage de Moïse qui est montré ici comme un guerrier sombre et un chef de guerre fanatique. On sent que Christian Bale s’est investi dans son rôle, même si ce n’est pas celui de sa carrière, mais il s’en tire très bien. Après, la prestation de Joel Edgerton en Ramsès m’a un peu déçu car nous ne voyons que très peu le personnage dans la première partie du film et cette relation que j’attendais tant entre Moïse et Ramsès n’est selon moi pas assez exploitée, le conflit est bel et bien présent entre les deux hommes mais bizarrement j’ai l’impression que cette relation très intéressante n’est pas assez mise en valeur dans le film. Voilà, Exodus : Gods and Kings n’est sans doute pas le grand péplum attendu qui annonçait un retour fracassant de Ridley Scott après le naufrage de son Cartel, mais le film s’en tire tout de même bien grâce à sa mise en scène, sa musique, ses impressionnants effets spéciaux et son souffle épique qui est malheureusement un peu absent par moment. Il faudra donc attendre, et on l’espère, une éventuelle version longue pour voir le film comme l’a pensé Ridley Scott et rejugé ce péplum biblique qui a déçu beaucoup de spectateur.