Là où Kitano s'arrête en se demandant le sens de toute cette hémoglobine versée cruellement à l'écran, Ki-Duk commence. Là où tout le cinéma hollywoodien s'arrête lorsque les gangsters assassins brutaux laissent place aux pulsions froides à n'en plus finir des serials killers pour qu'on s'identifie à des charismes d'acteurs en jouant sur nos frissons, Ki-Duc commence. Ki-Duc avait commencé fort sa filmographie, puis s'était auto-parodié avec le temps, baissant le niveau, nous laissant le souvenir de ses meilleurs crus (bad guy, locataires), jusqu'au résultat: sa grosse déprime, d'après les rumeurs, et son documentaire inédit sur ça, façon joaquim phénix. Bref cette Pieta relève du miracle cinématographique sud coréen, meilleure nation du monde en 7ème art, après l'Italie qui en fut le premier flambeau suite à l'invention des frères Lumière, ayant passé la flamme ensuite aux USA, par la densité des talents et leur originalité inédite. Il revient en force, meilleur que jamais. Allah Akbar/Hallelujah. Cette Pieta tourne rond, et bien, mécanique huilée, à la précision infaillible. Acteurs merveilleux, crédibles, naturalistes, et beaux, fantastiques. Cette énième vengeance sud coréenne explore les émotions sous les motivations, les sensibilités, ou ce qu'il en reste derrière l'inexprimé, le ventre à nourrir chaque jour, l'inexprimable, la vie normale à bouffer son prochain parce que on vit une époque formidable où la hargne irascible semble être récompensée par la reconnaissance sociale si le regret en est absent. Ki-Duc s'est débrouillé pour n'être jamais trop manichéen, mélange bourreaux et victimes, brouille l'ange et la bête, condamnant tout le monde, et sauvant qui a le cœur assez puissant pour se sauver lui-même, oh la belle histoire que voilà, quitte à ce que cela n'ait aucun sens, ça fait une trace, c'est tout, là où règne le vide. C'est facile à faire, il suffit d'ouvrir le barrage de ses souffrances. Il est toujours trop tard, pas pour souffrir, on sait que c'est un peu beaucoup la vie, non, pour s'en sortir définitivement. Il y a toujours un moment où ça peut basculer. S'en prémunir est impossible. C'est l'ultime argument pour faire le bien. Pour faire le mal aussi. Ki-Duc avec sa Pieta, nous offre un bon bol de Bien. Il a créé un style qui surnage au-dessus de la mêlée. C'est trop d'effort pour vouloir aller y voir, ou pour qu'il y soit tranquille. Status quo. 1 partout. Bravo l'artiste.